samedi 19 décembre 2009

Noël Noël

La neige n’est pas bien épaisse, mais elle résiste et chaque jour elle saupoudre un peu la ville d’un fin manteau de dentelle blanche. Le spectacle est au fond enchanteur, quelle que soit l’heure de la journée. Il faut juste se barder de vêtements épais de la tête aux pieds: aujourd’hui, la température est descendue jusqu’à -10°, -15° au début de la nuit… La fréquentation des marchés de Noël prend alors une tournure inattendue. Je dis des marchés, car il y en a à peu près partout ; sur la place centrale, devant l’hôtel de ville (la Marienplatz) et les rues adjacentes, mais aussi derrière l’hôtel de ville et sur une constellation de places des environs, sans parler de ceux du Theresienwiese, de Schwabing… On y trouve bien sûr de quoi agrémenter Noël dans la gemütlichkeit de son intérieur, des foules de bougies, de décors, lumineux ou non, en bois, très souvent, mais aussi en fer (ainsi de petites scènes rassemblant à de soldats de plomb dont les Bavarois sont friands), des jouets pour enfants, des chaussons, des écharpes et des gants de laine et des cadeaux de toute sorte. La ville entière est un espace qui incite à fêter Noël par un monceau de cadeaux.

Le marché de Noël donne le la, avec son ambiance festive, mais tous les magasins sont richement décorés et offrent une incroyable profusion de décors de Noël comme on n’en verra jamais en France. Même les paquets cadeaux suscitent l’émerveillement tant la variété en est grande et tant l’imagination peut s’en emparer. On peut même les acheter feuille par feuille… La gemütlichkeit fait aussi partie de l’ambiance des (grands) magasins : au lieu de fliquer le client, on s’ingénie à créer une ambiance agréable, confortable, à lui faciliter la tâche. Il finit toujours par acheter. Ainsi, la grande librairie de la Marienplatz, outre un café, a en son centre un vaste ensemble de fauteuils, de coussins et de sièges pour que chacun puisse y lire tout son saoûl. À peu près tous les grands magasins ont leur café (et une incroyable tripotée de vendeurs et vendeuses), mais celui du magasin d’aménagement de la maison Kaufinger, avec sa cascade de gâteaux replets, trapus, colorés, ses sièges en cuir et son odeur de café italien tient le haut du pavé. Au dernier étage d’une sorte de Printemps de la Marienplatz, Ludwig Beck, se trouve le plus grand magasin de disques de musique classique et de jazz que j’ai pu voir. Non seulement le choix est immense, la présentation soignée (et les prix normaux), mais absolument tous les disques peuvent être écoutés sur de véritables platines, avec de bon casques, à la volonté de chacun. La plupart des disques ne sont pas scellés et les livrets n’ont bien sûr pas disparu. Confiance, confort, qualité du service… La meilleure voie pour consommer de façon déraisonnable et avoir envie de se charger de cadeaux.

Pour achever de vous faire oublier toute préoccupation comptable, il y a ce qui constitue, au fond, l’essentiel des marchés de Noël : à boire et à manger. Tout d’abord le vin chaud, Glühwein, dont l’odeur envahit la ville, dès la sortie du métro – comme les intérieurs des bureaux, car on en boit lors des Weihnachstfeiern qu’on y organise (ainsi dans mon institut de recherche). Il se consomme debout, dans des tasses en céramique à n’importe quelle heure. Tout autour des débits de Glühwein (ou de punch chaud) se trouvent des petites tables ou des comptoirs pour s’accouder, parfois surmontés de petits toits, comme dans les Imbiss, ces petits endroits où les Allemands mangent le midi debout un plat modique et roboratif. Le nombre de stands de nourriture est tout simplement sidérant. Bien sûr, la saucisse grillée règne dans son petit pain rond, le Semmel, avec toutes ses variétés - beaucoup de bio. Mais on peut aussi manger du porc rôti avec des frittes, des Semmel aux harengs de la Baltique, au pâté de foie, des Schumpfnudel, sortes de gnocchis fins (pas du tout bleus), souvent mélangés avec de la choucroute, une profusion de desserts, Strudel variés, crêpes, diverses sortes de gaufres, de beignets, les Dampfknödel, des boulettes de farine (je n’ai pas essayé, ce sont des boules grosses comme des melons, noyés dans une sauce vanille), des fruits glacés dans le chocolat, des bombons, des pains d’épices, des Stollen (les brioches de Noël), toute sortes de pains d’épices, dont ceux, en forme de disque recouvert de chocolats noir (les traditionnels Lebekuchen) ou encore le fameux Kaiserschmarren (là, cherchez un peu !). Bref, on est souvent là pour manger, à toute heure, debout, sur les tables, en société, avec joie, les paquets de Noël posés aux pieds, dans la poudre blanche. De prime abord, cela paraît écœurant, mais avec un tel froid, je vous assure qu’un plat de Schumpnudel puis un petit Kaiserschmarren passent comme une lettre à la Poste (du temps du service public).

J’ai été bien long, mais le blog entre pour quelque temps en hivernage. Vous pouvez en attendant regarder quelques photos prises aujourd’hui ici. D’ici là, joyeux Noël à tout le monde et à l’année prochaine !

vendredi 18 décembre 2009

Étudiants, diants, diants, la suite


Les étudiants allemands arriveront-ils à obtenir gain de cause et à abattre le processus de Bologne ? S’il est difficile de deviner la suite des événements, j’en doute. Ils sont certes efficaces et bien organisés. La protestation passe naturellement par des manifestations mais aussi l’occupation des Audimax, les grands amphis des universités allemandes. Le mot d’ordre est « Unser Uni Brennt » (notre université brûle) mais l’inventivité des banderoles est presque infinie.
Ici celle qui figurait fin novembre dans le hall de la « nouvelle université » de Heidelberg, où l’on appréciera la dénonciation des notes en bas de page (« vous avez remplacé les philosophes par les bureaucrates/la pensée par les notes en bas de page/l'esprit par les boîtes à archives»).

L’occupation des Audimax est symbolique et ne nécessite pas un grand nombre d’étudiants. Mais ils ne sont pas délogés pour autant des locaux. Je ne connais qu’un seul contre-exemple, Tübingen. Même en Autriche, où les occupations sont totales (on dort et mange même dans les centres de recherche) et posent bien des problèmes, à ma connaissance, on ne déloge pas les étudiants. C’est qu’en Allemagne (au moins) les recteurs ne sont pas des agents du pouvoir mais des universitaires élus par leurs pairs dans chaque université. On comprendra qu’ils hésitent un peu à demander l’envoi de la troupe, comme on le fait si souvent en France. Pire, ils négocient et discutent avec les étudiants : l’occupation des Audimax s’est la plupart du temps faite avec leur accord. Discuter au lieu de taper, quel mauvais exemple !

Cela dit, le mouvement me semble (de façon empirique) plutôt minoritaire. Le nombre d’étudiants occupants et mobilisés ne paraît pas très impressionnant. A en juger par leurs modes d’actions, leurs revendications et la phraséologie, je dirais que l’on a affaire aux habituels étudiants d’extrême gauche et de leurs sympathisants. Calmes, policés, mais très déterminés. Il y avait, il y a trois semaines, une réunion à Munich pour la rédaction d’un appel européen. Des groupes de travail se sont réunis pour le préparer et le voter dans l’Audimax. Je suis allé y faire un tour le samedi. On mange, on dort dans l’amphi, bariolé de banderoles. Je n’y suis resté que quelques vingt minutes, assez instructives au demeurant. On y discutait longuement de l’usage des photos: allait-on autoriser les photographies de l’ensemble de l’amphi, totalement les interdire ou les autoriser seulement pour un coin de l’Amphi et si oui lequel et selon quelles modalités ? Chaque proposition est approuvée en silence on n’applaudit pas, on lève les deux mains en les agitant, « ainsi font font, les petites marionnettes »… On est loin du chaudron des AG françaises. La discipline est en apparence plaisante, mais le spectacle ridicule. On voit bien qu’elle n’empêche pas les discussions de s’ensabler dans l’anecdotique, dans le pinaillage dont raffolent les militants professionnels, les intégristes du combat.
Comme on peut le constater, je n’ai pas attendu le résultat du vote et n’en ai fait qu’à ma tête. Je suis toujours vivant. De cet appel, fort peu européen dans sa rédaction, je parierais qu’il ne sorte pas grand chose et que le mouvement n’obtiendra pas beaucoup.

À moins que… les Allemands sont surprenants. Les négociations en cours ont déjà donné quelques résultats : une partie des revendications concernant l’accès au Master pourrait être entendue. Le reste est une épineuse question d’argent ou tellement utopique que personne ne pariera sur leur réussite. Cela dit, le Président de la République (vous lisez bien), Horst Köhler, a prononcé assez récemment un discours dans lequel il disait comprendre les revendications et dénonçait le sous-investissement allemand dans les universités – pourtant bien moins grave qu’en France. On échange ?

jeudi 17 décembre 2009

Étudiants, diants diants


L’Allemagne est en ce moment secouée par un assez important mouvement de protestation étudiante, qui a pris sa source en Autriche et a trouvé des échos notamment en Suisse. Les revendications sont multiples : face aux frais d’inscription – plus importants qu’en France – on souhaite la gratuité complète des études, une hausse des moyens alloués à l’université ; un libre accès au Master sans sélection préalable ; enfin, la mise à bas du « processus de Bologne », nom donné à l’harmonisation européenne des cursus, mise en œuvre depuis environ une dizaine d’années. C’est le système connu en France sous le nom de LMD, Licence-Master-Doctorat, en Allemagne Bachelor-Master-Doktorat. Il y en a sous doute d’autres ferments, notamment en Autriche, que je ne maîtrise pas du tout.


Les revendications me paraissent en grande partie justifiées. Si les frais ne sont malgré tout pas très élevés, ils posent problème aux étudiants les plus modestes, d’autant plus que les bourses mensuelles ne dépassent pas 400 euros par mois. La gratuite totale est en revanche une illusion assez démagogique. Il y a eu quelque expériences d’abandon des frais, mais l’université y a alors perdu une grande part de ses ressources alors que le nombre d’étudiants a considérablement augmenté (c’est un des problèmes autrichiens). Vous imaginez la qualité de l’enseignement que l’on peut dispenser dans ces conditions. L’accès automatique au master (donc au diplôme de bac plus 5) me semble encore plus démagogique – et un rien contradictoire quand on a protesté contre l’allongement de la durée du premier diplôme de 2 à 3 ans.


Mais c’est un point de vue d’enseignant. Nos critiques ne sont pas les mêmes, je partagerais plutôt celles des enseignants allemands avec qui j’ai pu discuter. Le processus de Bologne est censé faciliter les échanges entre étudiants européens en harmonisant diplômes et rythmes de vie. En Allemagne, en vertu de la structure fédérale, il a été instauré indépendamment dans chaque Land. La diversité des solutions adoptées est telle que les échanges entre étudiants de Länder différents est devenue bien plus difficile qu’avant la réforme. Comme l’autonomie des universités n’est pas ici un attrape-nigaud, chaque université a concocté ses propres pâtes bolognaises, indigestes pour la voisine. Voilà comment on créée un capharnaüm européen. Bien plus, les enseignants se plaignent, comme nous, d’être devenus des machines à faire passer des examens et à donner des notes, comme de la logique de plus en plus consumériste des étudiants, qui vont à la chasse aux crédits et non au savoir. Ils dénoncent la bureaucratisation de la recherche, le manque de moyens, la mise en concurrence frontale et brutale des universités et des universitaires. La concurrence n’est pas un mal en soi si elle se traduit par une émulation. En Allemagne, comme chez nous (et pire, chez les Anglos-Saxons), elle se manifeste par une inflation exponentielle des publications, inversement proportionnelle à leur qualité, à la constitution, ou à la prospérité d’un groupe de super-Professeurs, super-payés, qui doivent leur place bien moins à leurs qualités professionnelles qu’à leur capacité à s’insérer dans le système de pouvoir, et en particulier dans le réseau de ceux qui évaluent les universités : un petit groupe est ainsi employé (et grassement payé) dans les agences (privées) qui notent les universités réclamant le statut d’excellence. Un de mes interlocuteurs y voit la mise en place d’un véritable système de corruption. Il y a au moins une confusion des genres et un groupe de cumulards que nous connaissons fort bien, et depuis longtemps, en France. De ce côté-ci du Rhin, les enseignants ne se révoltent pas, contrairement aux étudiants, qui n’ont, au fond, pas les mêmes griefs. Le Professeur allemand ne proteste pas, par atavisme, sans doute, mais aussi par ce qu’il est Herr Professor, un homme puissant, un privilégié qui a lutté pour obtenir cette place. Il n’existe pas d’équivalent de notre vaste corps intermédiaire des maîtres de Conférences (Dozent ici), qui a mené la révolte l’an passé. Nous savons bien que s’il avait fallu compter sur nos Professeurs à nous, l’université serait restée paisible et ils seraient presque tous allés à la mangeoire.


Quoi qu’il en soit, le processus européen en cours est pour la plupart d’entre nous, des deux côtés du Rhin, un vrai désastre. Le couple semestrialisation-Bologne est, à mes yeux, d’abord une catastrophe pédagogique, avant de porter en germe l’abaissement des niveaux de l’enseignement comme de la recherche dans toute l’Europe, voire une destruction de ce que notre système a de meilleur. L’atomisation, la culture du zapping, le goût de la vitesse au détriment du mûrissement, le consumérisme atteignent les étudiants comme les enseignants. Certains de mes amis socialistes défendent encore le processus, car il fut lancé par eux et parce qu’il aurait été saboté par le manque de moyens alloués. Le second point est juste, mais, vu d’ici encore plus qu’en France, on voit surtout l’œuvre d’un rabot bureaucratique et dogmatique, qui n’a jamais pris en compte la réalité des structures existantes ni fait confiance au pragmatisme – aggravé par le libéralisme ambiant . Un processus assez jacobin, donc français dans sa conception. Non, il n’y a pas lieu d’en être fier, comme de savoir que l’infatué Claude Allègre en a été un des maîtres d’œuvres.

mercredi 16 décembre 2009

Kinder surprise

Voilà comment on traite désormais les enfants en Allemagne:


Et l'on s'étonne qu'ils aient des problèmes de démographie!

lundi 14 décembre 2009

Das Wetter in Bayern (II)


L’attaque du général Hiver


Il a pris son temps, mais il est là, avec une belle première salve: une neige qui tient depuis vendredi, grâce au gel qui s’est installé. Le thermomètre stagne entre zéro et moins 7. La neige crisse sous les pas, mais elle durcit et n'est plus propre à la confection de boules.

C’est surtout le temps des bonnets, de ski, en laine à pompons ou andins, des chapeaux et des chapkas. Cela dit, de nombreux Munichois(e)s ne semblent pas encore trop craindre le froid puisqu’on les voit sortir la tête juste recouverte de leurs cheveux. Les bottes règnent chez les femmes, alors que les pieds des hommes, contrairement à leurs têtes, ne sont pas encore trop rentrés dans l’hiver. Ce ne sera pas mon cas !

*

Cela n’a rien à voir, mais je viens de lire ici une belle diatribe qui exprime mieux que je ne l’ai fait ce qu’on penser d’Astérix nouvelle manière.

vendredi 11 décembre 2009

Alexandre le Grand à Heidelberg


La réunion des nouveaux boursiers de la Fondation Humboldt se tenait cette année fin novembre à Heidelberg (Rhénanie-Palatinat). Pendant trois jours, réunions solennelles, discussions en groupes de pays plus ou moins voisins (on met ainsi la France avec l’Italie, l’Espagne, la Roumanie et… la Géorgie), par groupes de disciplines là encore plus ou moins voisines se succèdent. Nous étions accueillis dans les locaux de l’université de la ville : les plus anciens sont en plein centre ville dans de trapus bâtiments en grès rose. Le « grand amphi » local (Alte Aula) est une longue salle rectangulaire surchargée de boiseries et de vieux lampadaires en fer forgé qui nous transporte dans l’université du milieu du XIXe siècle. Mais l’université est dotée de locaux, souvent très modernes dans toute la ville qui est une petite ville avant tout universitaire.
La panel de chercheur est révélateur : moins de 20 % proviennent des sciences humaines et sociales. Un contingent très impressionnant de Chinois et d’Indiens forme le gros des bataillons dans les sciences dites exactes et les « sciences de l’ingénieur ». Mais il n’est guère de pays qui n’aie de boursiers : j’ai croisé, discuté notamment des Italiens, des Français, des Britanniques, des Espagnols, une Luxembourgeoise, une Bulgare, un Géorgien, un Tchèque, un Hongrois, des Roumains, quelques Américains des USA, des Brésiliens, des Indiens, un Ouzbek, un Grec, un Turc (qui ont fait ami-ami)… Si, dans les sciences humaines, tout le monde comprend et parle l’Allemand, ailleurs on ne parle qu’anglais. Les universitaires allemands sont même de fins anglophones, mais ils en viennent à ne même plus songer à employer leur propre langue : le discours inaugural de la représentante de la Fondation s’est fait exclusivement en anglais ; les courriels sont bilingues, mais parfois seulement en anglais (ainsi pour le «club des Humboltiens de Munich») et le responsable d’un gros programme de recherche en histoire à Heidelberg nous a d’emblée présenté le projet en anglais, alors que l’intégralité du groupe maîtrisait très bien l’allemand ; il ne s’est même pas posé la question. Cela n’étonnera personne, je fus des râleurs. Et l’allemand revint.
Les conditions de séjour valent la peine d’être racontées. Nous avons dîné le premier soir dans un des restaurants les plus chers de la ville, au « Ritter », dans une imposante bâtisse, une des seules à avoir survécu, dit-on, au sac de la ville, à la fin du XVIIe siècle, par les troupes bien intentionnées de Louis XIV. Les Français que l’on voyait alors à Heidelberg étaient là pour piller, violer et brûler. Il semble que l’on ne nous en tienne pas trop rigueur. Le lendemain, le dîner avait lieu dans un luxueux restaurant qui domine la ville, au-dessus de la forêt et des ruines du château (détruit par qui vous devinez), à l’aplomb de la vallée du Neckar. Il faut imaginer que ce sont à chaque fois environ 200 couverts qui sont payés, auxquels s’ajoutent les pauses café et thé, pourvues en abondance en gâteaux de toute sorte.

Mais le nec plus ultra était le logement à l’hôtel Europäische Hof, un 5 étoiles, le plus coûteux de la ville. Un véritable grand hôtel, avec un personnel nombreux, stylé, un piano bar, une salle de sport, un spa, un grand restaurant et des chambres comme jamais un universitaire n’en connaît dans sa vie professionnelle – et ne peut s’en payer dans sa vie privée. Nous n’avions bien sûr pas les meilleures. Mais jugez-en par un inventaire : assez vastes, lumineuses, avec un éclairage sophistiqué assorti d’une multitude de glaces ; un coffre-fort, un mini-bar, une connexion Internet pour portable ; une télévision grand-écran plat avec connexion Internet (le clavier est fourni), vidéo à la demande (y compris films porno allemands…), de l’eau minérale à volonté, un chocolat sur l’oreiller ; un appareil à repasser (verticalement) les pantalons, un nécessaire à couture, de quoi nettoyer ses chaussures, mais aussi un service gratuit de cirage (jusque 2 heures du matin), ou payant de nettoyage de vêtements ; peignoir de bain et chaussons sont également fournis ; la salle de bain est munie d’un téléphone, de distributeurs de mouchoirs en papier (à chaque fois pliés en biseau pour marquer leur caractère propre), de divers produits de bain, de cotons-tiges, d’un miroir grossissant (pour se maquiller, se raser ou se percer avec joie et précision les boutons), d’une baignoire avec double système de douche et surtout remous… Le petit déjeuner est potentiellement le plus pantagruélique que l’on puisse imaginer : jus de fruits frais pressés, dans des carafes posées dans la glace, œufs et bacon, saucisses, weisswurst bien sûr, avec ses moutardes, charcuteries, y compris boudin (si si), harengs marinés (il faut oser), fromages frais et secs, choix de yaourts, de fromages blancs frais ou aux fruits, compotes ad hoc, muësli à composer soi-même à partir d’un grand choix de graines et de fruits frais et secs, beurre, croissants, petits gâteaux, toasts, brioches, pains de toute sorte à couper soi-même en les tenant via une serviette immaculée, confitures maison, Nutella, choix de miels et j’en oublie ! Il est bon pour la ligne que ces rendez-vous ne se prolongent pas trop.
Les vacances scientifiques se prolongent par une visite de la ville, très unitaire puisque reconstruite après les ravages de mes compatriotes. Grâce à nous, Heidelberg est une admirable petite ville baroque (et relativement sobre), dominée par une sorte de grès rose et des crépis aux teintes vives. Comme il semble que la Fondation me paye pour travailler, je m’arrête là : les curieux pourront voir plus d’images ici.

jeudi 10 décembre 2009

Alexandre le Grand


La princesse qui me paie les frais de séjour à Munich s’appelle la Fondation Alexander von Humboldt. Naturaliste et voyageur du XIXe siècle, il est aussi le frère de Wilhelm von idem, le fondateur de l’université allemande. Dans son état actuel, la Humboldt-Stiftung date de sa refondation en 1953. L’institution n’a pas de parallèle en France : son financement est essentiellement public : ce sont les ministres des affaires étrangères et de la recherche qui lui allouent la quasi totalité de ses fonds. Plusieurs centaines de chercheurs du monde entier se voient chaque année allouer des bourses de 6 à 24 mois, qui permettent de vivre presque confortablement en Allemagne. La Fondation finance au total 1 800 chercheurs. L’institution qui les accueille, université ou centre de recherche, reçoit en plus des fonds pour compenser les frais induits par la présence du boursier (Stipendiat) et pour lui payer ses frais de déplacement, d’achats de matériel, de livres, etc. La fondation souhaite attirer ainsi des jeunes chercheurs en Allemagne, promouvoir les échanges entre chercheurs allemands et étranger, irriguer le système de recherche allemand. C’est une habile politique diplomatique, qui participe au rayonnement de l’Allemagne et à la diffusion d’une meilleure image du pays... Voilà pourquoi la Fondation dispose de moyens très impressionnants. Car les chercheurs disposent, en plus de la bourse, de bien des avantages : payement des frais d’assurance, subvention pour déménagement, paiement de cours d’allemand intensifs au Goethe-Institut (jusqu’à quatre mois), etc. La fondation organise de nombreuses rencontres annuelles en Allemagne pour tous ses boursiers (j’y reviendrai), tous frais payés, et même au mois d’août un « tour d’Allemagne » de quinze jours. On nous offre revues, dictionnaire, guide, cartes, agenda, stylos, pin’s et cravate de la Fondation ! Tout est donc fait pour nous germaniser. Avec succès ? C’était sans compter l’écrasante domination de l’anglais, qui s’insinue partout en Allemagne et est devenue une lingua franca.


Mais je ne boude pas mon plaisir et je tremble à l’idée qu’un sbire du gouvernement français apprenne qu’il est un pays voisin et ami où l’État paye dignement des chercheurs, avant tout étrangers, en leur offrant de splendides conditions de travail et une liberté de recherche totale sur le sujet qu’ils ont choisi. Quelle horreur ! Fort heureusement, c’est totalement impossible chez nous.

jeudi 3 décembre 2009

Astérix et les Gogos

C'est un bref message, car je n'ai guère le temps d'alimenter le blog en ce moment. J'ai évoqué en octobre les 50 ans d'Astérix, qui a donné lieu, en Allemagne comme en France, à de multiples célébrations. Est sorti à cette occasion un album spécial, simultanément en France et en Allemagne et sans doute dans bien d'autres pays. La version allemande est strictement identique à la version française, sauf qu'elle est allemande. Je l'ai trouvé consternante et ce n'était pas l'effet de l'allemand, l'album français est tout aussi médiocre. N'achetez pas ce machin! On le savait depuis un bout de temps, mais cela vérifie deux adages:
- Une bonne BD, c'est d'abord une bonne histoire. Uderzo est un bon dessinateur, mais il est un scénariste lamentable et la mort de Goscinny il y a trente ans est une perte irremplaçable.
- La vieillesse est un naufrage...

*

Rien à voir: le sondage est arrêté presque sur une égalité. Certes, il y a plus de oui (33 %) et de Ouiii! (16 %) que de non (16 %), donc une majorité apparente d'obsédés, mais il y a aussi 33 % de "je me tâte" - faut-il les considérer comme des hésitants ou comme des obsédés pratiquants?

*

Pour finir, une question: où est-ce?

vendredi 27 novembre 2009

Trop foehn

La semaine passée, le foehn a finalement glissé jusqu’à Munich, qui s’est retrouvée caressé par un air à 18 degrés en plein mois de novembre. On dit ici que ce vent affecte le tempérament des Munichois, qui ont des maux de tête, ou deviennent subitement nerveux, voire, pire, ne respectent pas fidèlement le code de la route. Je n’ai rien remarqué de tel mais je me suis précipité pour profiter, le temps d’une pause déjeuner, de cette chaleur, du soleil et de la vue sur les Alpes qui deviennent alors bien plus proches. La tour de l’église de Pierre (Peterskirche), entre le Viktualienmarkt et la place de l’hôtel de ville, la Marienplatz, est à cette occasion un des belvédères les plus agréables. Il faut bien sûr s’armer de patience, car tout se fait à pied et les escaliers sont raides et longs. Mais les Alpes sont là, bien nettes, à l’horizon, avec à leur extrémité ouest la Zugspitze, le point culminant de la Bavière et donc de l’Allemagne. Le soleil, rasant, découpe les plans et les toits de la ville sont comme le décor d’un circuit de train miniature. En bas, les Biergarten sont de nouveau ouverts et j’ai pu, comme des milliers de Munichois, manger au soleil, qui, bien sûr, dorait la bière accompagnant le repas.



Cela n’a rien à voir, mais le nombre de visiteurs de ce blog a dépassé le chiffre de 100 ; grâce, sans doute, aux fidèles qui vont voir chaque jour si je n’ai pas déposé un joli photo et découvert une nouvelle bière. Je dois tout de suite rassurer les inquiets : je ne pourrai goûter toutes les bières allemandes, malgré une bonne volonté évidente : il y a ainsi 530 brasseries artisanales en Bavière.

mardi 17 novembre 2009

Le lac, les morts

L’automne laisse quelques moments de répits pour aller à nouveau goûter l’air frais de la « région des cinq lacs », à nouveau le Starnbergersee, mais sur sa rive est.



Une très belle campagne, entre forêts de plus en plus déplumées, champs labourés, grasses prairies ou paissent vaches et chevaux, et villages très soignés : c’est un des endroits d’Allemagne où la concentration de riches est la plus forte. On ne compte plus le nombre de demeures d’architectes, qui, soit dominent le lac, soit, perchées sur un petit coteau, s’offrent une véranda avec vue sur les Alpes. Si le temps était couvert, le foehn, venu d’Italie, soufflait sur les Alpes et les illuminait. Les nuages ne pouvaient s’y attarder très longtemps. Il arrive que ce vent qui rend fou s’aventure jusqu’à Munich ; on y voit alors des Munichois très énervés et les sommets enneigés, depuis la ville. Ces vues font le succès des cartes postales de Munich mais on ne peut en profiter, semble-t-il, que deux ou trois jours par an.

Les villages sont donc avant tout des villages de riches retraités ou résidents secondaires, au milieu desquels sont glissés des paysans de moins en moins nombreux. Mais il reste encore une vie locale et je suis tombé sur une de ces manifestations, un peu au-dessus du lac, exactement à Aufkirchen-Aufhausen. C’était le jour des morts, des morts à la guerre. À côté de l’église, se dresse le monuments aux morts, un cippe où est sculpté un soldat allemand reconnaissable à son casque modèle 1918, avec une impressionnante liste des pertes des deux guerres. Tout autour étaient rassemblés, en uniforme, les pompiers volontaires (à gauche), des soldats des troupes de montagne, des vétérans et des villageois en Tracht, les premiers arborant leurs médailles, et une musique – les musiciens étaient aussi entrachtés. Outre les drapeaux, on distingue aussi les prêtres : c’est une cérémonie nationale et religieuse, nous sommes dans un pays où l’Église n’est pas séparée de l’État. Il paraît qu’il y a eu pour cette raison des tensions avec certains prêtres, qui ne supportaient pas le caractère trop national, voire nationaliste, de la fête. Ce caractère se serait fortement estompé. Les vidéos que j’ai tournées avec mon appareil photo sont des plus médiocres, la définition état minimale. Mais vous aurez la musique, avec quelques coups imitant le canon, et le défilé final. J’ai entendu l’hymne national allemand, mais aussi « Ich hat einen Kameraden... » et l’hymne national bavarois, État fédéral oblige.


Tout le monde était très concentré, très droit, presque martial, mais on me dit que c’est très clairsemé et que cette tradition dépérit un peu. La date ne correspond bien sûr à aucune des deux guerres mondiales, perdues par l’Allemagne.


Un détail amusant : un peu plus loin, sur une colline, dans une forêt, des nationalistes ont fait bâtir dans les années 1920 un monument pour Bismarck, qui a le don d’exaspérer les Bavarois. C’est que le bougre a construit l’Allemagne contre les Bavarois, battus avec leurs alliés autrichiens. Ce n’est assurément pas un héros bavarois et il a assez mauvaise presse dans l’Allemagne d’aujourd’hui, profondément pacifiste, contrairement à ce que cette cérémonie pourrait laisser entendre. Pendant celle-ci, la population alentours faisait son jogging du dimanche, promenait le chiens et les enfants, voire plongeait en combinaison de néoprène dans le lac.

*

Pour les curieux, j'ai ajouté d'autres photos à la fin de l'album des cinq lacs.

dimanche 15 novembre 2009

Gloire au Goethe-Institut !


Septembre et octobre n’ont pas constitué pour moi simplement la saison des champignons, mais surtout celle des cours au Goethe-Institut. Il est un peu étrange de redevenir étudiant, de réviser ses cours, d’être interrogé, de faire des devoirs chez (Hausaufgabe), sur place et d’attendre presque avec appréhension la note. J’en ai passé l’âge, mais cela restera parmi mes plus beaux souvenirs de cours.

L’institution occupe l’essentiel d’un immeuble moderne d’une rue du centre de Munich, la Sonnenstrasse, qui suit le tracé des remparts du Moyen Âge. Immeuble et décors sobres, un peu froids, fonctionnels, avec comme seule fantaisie l’omniprésence du liseré vert qui caractérise le Goethe-Institut. Il ne faudrait pas s’y tromper : cette modestie apparente cache mal les importants moyens dont bénéficie l’Institut. Du personnel d’abord : administratif bien sûr, d’accueil (dont les fameux Zivis), mais aussi des bibliothécaires et des enseignants parmi les meilleurs du genre. Toutes les salles sont naturellement équipées en rétroprojecteurs et matériel de toute sorte, notamment audio. La Mediothek, au dernier étage, est un très bel endroit pour travailler : une grande quantité de livres, dont une foule surprenante de méthode de langue, de grammaires, de cahiers de vocabulaire, certes, pour la seule langue allemande, mais écrits pour des dizaines de langues ou peu s’en faut ; une splendide collection de dictionnaires où il fait bon se perdre, des guides, un peu d’histoire, de géographie ; des romans, classés en fonction du niveau de langue – connu de tous, puisque les cours sont donnés par niveaux au sein duquel nous sommes placés après un test initial. On y trouve aussi l’inévitable matériel pour des cours de langue, cassettes (eh oui, encore ! mais c’était leur dernier mois) et CD que l’on peut écouter dans une salle audio isolée, des DVD, des collections d’exercices, des annales d’examens, etc. Enfin, une salle informatique où certes les cours peuvent se tenir, mais où les étudiants ont accès à tout, peuvent imprimer et photocopier à volonté. Un peu d’eau dans un distributeur, la presse, les revues, l’actualité culturelle de la ville, que demander de plus ? Les bibliothécaires ont fait des études de germanistique, ce qui leur de guider aisément les étudiants. Nous recevons tous, chaque mois, un grand classeur avec des intercalaires où l’on peut classer les innombrables photocopies que donnent les enseignants (déjà perforées…). Les livres de langue sont distribués également. On comprend, dans ces conditions, que le prix des inscriptions soit assez élevé.
Peut-être le Goethe-Institut a-t-il d’autres entrées d’argent puisqu’il vend désormais des produits dérivés, présentés dans une vitrine : cahiers de notes, stylos, parapluies, sacoche, sac à dos, tapis à souris, teee-shirt, etc. Il est donc possible de vivre totalement dans l’ambiance Goethe-Institut, il ne manque plus que des sous-vêtements.

Les classes ne dépassent pas, à ma connaissance, une quinzaine de personnes, ce qui influe beaucoup sur la qualité de l’enseignement et sur notre travail. On se connaît très vite, surtout lorsqu’on est inscrit dans un cours « Intensiv 4 » comme moi : quatre heures de cours cinq jours sur sept pendant environ quatre semaines, deux à trois fois plus que ce que font des étudiants d’un groupe de travaux dirigés sur un semestre universitaire. On se parle pendant les pauses, mais tout est fait par ailleurs pour que les étudiants se fréquentent et découvrent activement la région. Beaucoup sont logés dans un autre immeuble de l’Institut, où ils ont des petites chambres individuelles et des salles communes. Les Zivis organisent surtout une multitude de sorties, qui ont lieu tous les jours. On fait découvrir la ville sous toutes ses facettes : musées, châteaux, expositions, promenades guidées dans le centre, dans les grandes manifestations (Oktoberfest), et ce le matin et l’après-midi pour chacun puisse y participer sans prendre sur les heures de cours. Le week-end, ce sont des excursions plus longues, comme tel monastère de la campagne (Andechs) ou les châteaux de Louis II. Est aussi proposé chaque mois un Weißwurst-Frühstück. Des sorties culturelles à prix raisonnables sont organisées au théâtre, à l’opéra (10 euros). Qui plus est, tous les jeudis, pendant la belle saison (cette fois-ci jusque début octobre), on rassemble ceux qui le veulent dans un Biergarten, toujours le même, puis, à partir d’octobre, dans une Stammtisch d’une brasserie du centre. La Stammtisch est une institutions typiquement allemande : les groupes d’amis, de conscrits, d’exilés, de collègues, d’intérêts communs, réservent une table dans une brasserie ou un bar, à jour fixe, pour se retrouver et deviser en vidant des bières. On comprend que, dans ces conditions, des liens étroits puissent se tisser rapidement entre les étudiants de toutes origines.

Car le Goethe-Institut est une vrai Babel. Les couloirs résonnent de dizaines de langues différentes, du mois quand des mêmes nationalités se rencontrent. La langue des échanges est, pendant les pauses, l’anglais pour ceux qui débutent dans l’apprentissage de l’allemand (ceux du premier niveau, Grundstuffe), mais très vite l’allemand, pour ceux des deux niveaux supérieurs. L’allemand devient alors une langue internationale, colorée de d’accents très variés. En deux mois, j’ai ainsi côtoyé au quotidien trois Français, deux Russes, trois Japonais, une Brésilienne, une Suissesse du Tessin, un Mexicain, une Serbe, une Espagnole, un Saoudien, un Omanais, une Coréenne, un Mexicain, un Hongrois, un Américain, une Polonaise, un Belge flamingant, une Turque, un Tchèque. Mais j’ai entendu beaucoup d’Italiens, de Grecs, une Ukrainienne, un Irlandais, un Roumain… Les accents se mêlent et l’on reconnaît aisément les origines grâce aux défauts de prononciation. Les Français, comme on s’y attend, l’ont exécrable. Ils aplatissent la langue, la ramollissent, lui ôtent la musique. Mais les Japonais nous concurrencent, tant ils sont difficiles à comprendre. D’une part parce que leur réserve (qui n’est pas légendaire) fait qu’ils parlent très peu, ce qui n’aide pas à progresser. Ensuite parce que leur palais est formé par une langue très éloignée ; la confusion entre le « l » et le « r », qui a donné lieu à une scène comique de Lost in Translation, n’est pas une cliché. Je me suis senti plus d’une fois Bill Murray (ce qui n’est pas mal, ma foi). Les néerlandophones, de façon surprenante, sont difficiles à comprendre ; on a l’impression qu’ils parlent allemand avec de la purée dans la bouche (le w sont ainsi prononcé oue).
Tous sont curieux, ouverts, aventureux : nombre d’entre eux ont chois de vivre et de travailler ici, de façon permanente ou temporaire, pour l’expérience, ou du moins apprendre plusieurs langues pour progresser dans leurs études, dans leur métier. Tous ne sont pas pour autant faciles d’accès. Il faut du temps pour prétendre avoir une conversation avec les Japonais, mais ils sont d’une courtoisie et d’une élégance de comportement rare. Les Russes sont complexes. J’ai dit en avoir rencontré un drôle et sympathique, mais c’était bien le seul ; on rencontre surtout des jeunes femmes, sophistiquées, hautaines, cachées derrière une épaisse couche de maquillage, superficielles, ignorantes et arrogantes. Moi qui partait avec un a priori très favorable à tout ce qui était de près ou de loin russe, je suis tombé de haut. Il faut croire que la sociologie des Russes qui fréquentent le Goethe Institut est particulière.

Les professeurs se débrouillent admirablement bien de cette diversité. Ils sont là pour nous faire travailler et y parviennent : la masse de travail quotidien avoisine les trois heures, pour qui fait simplement ce qui est demandé. Mais il vaut mieux lire les journaux, réviser, faire des exercices supplémentaires, que sais-je encore. Je n’ai eu que deux enseignants, assez différents de tempérament, mais tous les deux passionnants. Les cours sont véritablement interactifs. S’ils savent où ils veulent nous conduire, s’ils s’adaptent en permanence aux questions, qu’ils suscitent, aux réactions, aux erreurs. Le cours a une base, un programme, mais il se construit avec la classe, sans pour autant que les places ne soient confondues. Au total, j’ai rarement autant appris, rarement autant pris plaisir à apprendre – car on rit beaucoup. Quel contraste avec l’enseignement reçu dans le secondaire français, où je me suis mortellement ennuyé ! J’ai même pris du plaisir avec la grammaire, c’est tout dire.
Ces fortes personnalités nous ont accompagné, en fin de mois, dans ce qu’on pourrait appeler des after. Il s’agit à vrai dire d’une tradition, mais qui n’est pas instaurée, une pratique vers laquelle personne ne nous pousse, sinon le désir, à chaque fois, de conclure ce mois par une fête avec le prof. Avec le premier, ce fut une épique soirée à l’Oktoberfest. Monsieur K. (1re, photo de classe et ci-dessus), petit bonhomme en rondeur, toujours souriant, un rien espiègle, tient bien l’alcool (au moins 4 Maß de bières) et doit s’y perdre. On finit par le tutoyer. Monsieur H. (2e photo de classe plus haut et ci-contre), grand gaillard venu de Berlin, est plus intimidant, par sa colossale culture, l’énergie débordante qu’il dépense en cours, y compris physiquement en faisant force imitations et gestes pour nous faire rentrer – avec succès – la phonétique dans le crâne. Mais c’est sans doute un des meilleurs enseignants que j’aie rencontrés de ma vie. Bon vivant aussi, il nous entraîné dans une brasserie où il a ses habitudes et il aurait sans doute pu aussi encaisser l’Oktoberfest.

Je suis ressorti de là en ayant beaucoup appris, rencontré des gens passionnants et en ayant eu envie d’enseigner autrement. Alors, oui, gloire au Goethe-Institut !

samedi 14 novembre 2009

Munich, c’est chou


Fred est un des mes plus vieux amis – presque un ami de trente ans, mais il est encore trop tôt pour se trahir allègrement – qui est en même temps un des plus jeunes d’esprit. À l’occasion de la naissance de sa petite dernière (qui a failli s’appeler Ermentrude, mais ses parents ont in fine préféré Blanche, allez savoir pourquoi), il tient depuis quelque mois un blog, où il donne quelques nouvelles, diablement capillotractées, de sa vie familiale. Ce gourmand provoque son monde en donnant force photos et descriptions de bons vins et de bons plats alla francese, et se gausse un peu de mon menu à base de saucisses-choucroute (on verra bien sa brioche, tiens). Il est donc temps d’équilibrer un peu la saveur charcuto-cauliaire de mon propre blog. Certes, il est vrai que la saucisse abonde et que le chou est prisé. Les étals sont pleins de choux de toute sorte, rouges, verts clairs, verts foncés, gros pommés, petits de Bruxelles, blancs, etc. (je m’arrête là car j’ai alors en sorte de choux, six). Mais les marchés de Munich regorgent d’une incroyable variété de légumes et de fruits où les choux ne sont pas plus que des petits cailloux parmi d’autres. Sur le marché central, le Viktualienmark, outre les fleuristes, les marchands de petits cœurs et de hiboux, les fromagers (les charcutiers, il est vrai, aussi), on trouve des dizaines de marchands de légumes, souvent bios, dont les étals varient presque à l’infini selon les saisons. Septembre-octobre est la saison des champignons, qui sont même vendus dans les rues, dans des petits étals provisoires. On commence par une incroyable quantité de girolles (Pfifferlinge), qui font de loin comme des parures jaunes, presque dorées. Bien sûr, il faut être vigilant, certaines viennent de plus loin de Pologne ou de Bohême, et ne sont pas très fraîches. A ces grosses trompeuses, il vaut mieux préférer les petites locales (même si certaines abusent, elles sont minuscules comme des poux).

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Mais, comme cette photo le monte, on vend toutes les sortes de champignons disponibles. Les girolles sont petit à petit remplacées par les cèpes (Steinpilze), un peu hors de prix, mais quel régal ! Surtout si on les cuisine très simplement, car je dois à la vérité de dire que les Allemands ont tendance à tout cuisiner en sauce, y compris les champignons. Le résultat peut être intéressant, mais on perd le goût du produit frais. La saison continue toujours et on en mange partout. En ce moment, les marchés sont inondés de dattes fraîches (guère locales), de marrons, de pommes, de poires et de citrouilles, ou de potirons. Là encore, je n’en avais encore jamais vu une telle variété. Je fais juste figurer la version individuelle (une portion). La citrouille se sert partout, sous toutes ses formes, mais surtout en soupe (Kürbissuppe). Car on boit beaucoup de soupes ici : souvent en entrée, mais elles peuvent aussi constituer de roboratifs plats uniques. Il existe même de nombreux petites restaurants qui ne servent que des soupes, à prix très modiques.

Avant de pouvoir la cuisiner, il faut couper ce légume à la peau coriace, exercice toujours délicat et qui demande un peu d’énergie. Comme j’aime faire joujou, vous pouvez voir ce que ma préparation a de particulier à la découpe, et admirer la réaction variée de la bestiole selon sa face – la seconde est bien sûr un hommage.

Voilà comment on satisfait en peu de frais ses instincts meurtriers ! Pour la suite, je ne me suis pas foulé, pour faire une soupe, une purée, une tourte, une tarte, un gratin, non, ce fut juste une modeste poëllée. Mais c’était tellement bon que j’en suis resté sur les genoux.

Voilà aussi pourquoi Munich, comme on dirait en Suisse, c’est chou.

lundi 9 novembre 2009

9 XI 9

Rassurez-vous, je vous épargnerai une leçon d’histoire, vous devez en avoir presque la nausée de la chute du mur. Donc, rien sur les manifestations, rien la somptueuse bourde du porte-parole du gouvernement de la DDR au soir du neuf, rien sur la foule sur le mur, rien sur Rostropovitch. Mais je ne pouvais tout de même pas rester silencieux aujourd’hui. Ce sera par le biais de deux témoignages de gens qui n’y étaient pas…

Le professeur berlinois
L’excellent enseignant que nous avions en octobre au Goethe-Institut est Berlinois. C’est un grand gaillard un peu dégarnit, aux cheveux gris, très énergique, bavard comme pas deux, j’aurais peut-être l’occasion de reparler de lui. Dans un cours, alors qu’il était question de cette époque, quelqu’un lui a demandé où il était ce jour là. Il n’en fallait pas plus pour qu’il déroulât ses souvenirs de 1989. S’il est né à Berlin, il a trouvé du travail à Munich où il vivait déjà à l’époque. Mais il allait très régulièrement à Berlin, où il avait des amis des deux côtés du mur. On l’oublie, mais les Allemands de l’ouest pouvaient relativement facilement aller à l’est, si ce n’étaient des nombreuses tracasseries administratives. Il y allait donc, parcourait la ville, voyait ses amis, chez eux, ou dans les bars, les restaurants, les Kneipe. S’il était le 09 novembre à Munich, il avait suivit de près les événements ; il était encore à Berlin-Est moins d’une semaine auparavant. Or, il constatait avec étonnement que l’ambiance et l’attitude des Allemands de l’Est avaient radicalement changé. Il faut bien se représenter la société grise, la société de la peur qu’était la DDR, dans chaque détail de la vie quotidienne. Dans les restaurants, personne ne pouvait s’asseoir où il voulait. Le serveur plaçait les gens, même contre leur gré, sur des petites tables. La pratique parait incongrue en Allemagne, où l’on s’assoit où l’on veut, là où il y a de la place, sur de grandes tables qui favorisent les toasts et les conversations. C’était justement une façon très efficace d’interdire tout regroupement. Bien sûr, personne ne parlait de politique, et surtout pas à un ouest-allemand. Dans le secret des foyers, on était aussi prudent et méfiant. On regardait souvent la télévision de l’ouest, mais on le cachait. Il fallait alors bien éduquer les enfants, qui pouvaient trahir les parents sur ce qu’ils regardaient lorsque les instituteurs les interrogeaient. Il y avait bien sûr des communistes sincères qui ne regardaient que les médias officiels de la DDR. Cela posait des problèmes quand un couple se formait, dont l’un avait regardé avec ses parents la télévision de l’ouest, et l’autre celle de la DDR. C’étaient de véritables couples mixtes. Le Professeur - appelons le Monsieur H. - nous a cité le cas d’un couple de ses amis, dont l’épouse, issue d’une famille de vrais communistes, avait caché jusqu’en 1989 que la famille de son mari avait d’autres sources d’information.
Et voilà qu’à Berlin-Est, cet automne-là, il est entraîné par des amis dans un café. Il s’asseyent d’eux-mêmes, sans attendre d’être placés, ce qui était déjà en soi un acte de rébellion. Pire, ils engagent une conversation animée avec leurs voisins, des inconnus, et critiquent le gouvernement, bref parlent de politique. Personne ne se cache de regarder la télévision occidentale, qui est la meilleure source d’information sur les manifestations en cours dans la DDR. De ce moment, affirme Monsieur H., j’ai conclu que la DDR était finie, ce n’était qu’une question de temps. Il prétend l’avoir annoncé à son retour à Munich et que tout le monde l’a traité de doux rêveur. Le fait est que même lui fut surpris par la rapidité de l’effondrement et surtout des événements de la nuit du 09 novembre. C’est un couche tard, il a donc eu la chance de tomber au milieu de la nuit sur les informations. Stupéfait, bouleversé, il a décroché son téléphone pour joindre ses amis sur place, personne ne répondait. Il a essayé partout, a veillé toute la nuit. Très tard, une amie est-allemande l’a finalement appelé : «Je t’appelle de Berlin. De Berlin-ouest, tu te rend comptes ?!! » Ses amis avaient naturellement tous sauté le mur. Il lui a fallu quelques jours de plus pour les rejoindre, le temps que fondent les plaques de verglas qui rendaient les autoroutes impraticables – bien sûr, les trains étaient pris d’assaut. « Verstehen sie, ich bin berliner. » ajoutait-il, très ému par son propre récit. Il n’était pas le seul dans la salle. Les Bavarois étaient de leur côté restés impassibles, voire insensibles aux événements. Comprenez bien : ils sont avant tout Bavarois.

Un étudiant à Paris
Ce qui m’a fait comprendre que nous, à Paris, avions ressenti l’événement avec plus d’intensité et d’émotion que les Bavarois. J’étais étudiant dans une des universités de la Sorbonne. Quel étudiant en histoire n’est pas passionné de politique ? Quel observateur même peu averti comme nous l’étions n’aurait pas senti le vent de l’histoire passer avec fracas ? D’autres raisons ont fait que le 09 novembre 1989 a profondément touché des gens comme moi. Nous avions vécu avec effroi le massacre de la place Tien-An-Men en juin de la même année. J’appartiens aussi à une génération qui a été éveillée à la politique et à l’actualité dans la guerre froide, dans l’Europe divisée, qui a vécu la crise des missiles des années 1980 (SS-20 soviétiques, contre Pershing de l’OTAN). Par l’histoire de ma famille et mes études, je savais que cette situation n’était pas normale, que l’Europe ne s’arrêtait pas à la frontière de la BRD. Sans doute une ambiance familiale anti-communiste, qui m’a peut-être conduit à quelques errements politiques, a-t-elle joué aussi dans l’attention portée à ce qui se passait à l’est, et rendu hyper-sensible a ce que vivaient les hommes vivant dans ces dictatures – sans parler d’une germanophilie contractée à l’adolescence. Mes héros étaient Soljenitsyne, Havel ou le syndicat Solidarnosc. Et voilà que sous nos yeux, les citoyens de la DDR brisent le masque de la « vie dans le mensonge » (Havel), proclament « Wir sind das Volk » ; voilà que ce mur, avec qui je suis né, cette plaie béante au coeur de l’Europe, s’effondre en deux-temps trois mouvements sous l’effet de ces marées humaines – et bien sûr du processus lancé par Gorbatchev. Autant que je me souvienne, nous ne parlions que de çà et dévorions l’actualité. Dans les semaines qui ont suivi, les étudiants n’ont cessé de se précipiter à Berlin, prenant eux aussi d’assaut les trains : il fallait y être. Je regrette aujourd’hui de n’avoir guère été audacieux et d’être resté à Paris pour discourir. Il n’empêche, ces jours-là m’ont profondément marqué et le récit de Monsieur H. m’a sans doute ému plus que les autres.

Et après ?
Bien sûr, il y eu les ratés de la réunification, les mensonges du gros Kohl, prêt à tout pour devenir le chancelier de la réunification : dans l’Allemagne réunifiée, l’Est se recouvrirait immédiatement de paysages prospères. Les « Blühende Landschaften » de Kohl sont restés célèbres, tant l’économie a vite été ruinée et le chômage a explosé. Bien sûr, les Allemands de l’Est comme les autres peuples voulaient la liberté, pas le capitalisme sauvage et ils ont eu les deux, le second altérant sérieusement la première. Bien sûr, les retrouvailles entre les deux Europe ont été ratées, alors que ç’aurait dû être une colossale fête. Mais ils ont conquis leur liberté, et ça n’a pas de prix. Au fond, c’est surtout ce que je retiens et qui fait que ce jour est pour moi encore émouvant.

samedi 7 novembre 2009

Au pays des cinq lacs


L’automne a apporté la pluie, le froid, le vent et les bonnets. Mais il a le bon goût de laisser le soleil briller en fin de semaine, ce qui m’a donné l’occasion d’aller voir quelques lacs au sud de Munich. La Bavière est constellée de lacs, autant de signes de pistes argentés qui conduisent sans qu’on n’y prenne garde au pied des glaciers alpins. Les Bavarois y affluent l’été pour y enlever leur Lederhose et s’esbaudir en petite tenue. La saison ne s’y prête guère, les pontons sont déserts et les bateaux sont à quai. Il n’y a que les canards, les poules d’eau ou les mouettes qui sillonnent les lacs. Lorsque le soleil les illumine, c’est donc à la fois un enchantement et un calme reposant. Je suis allé dans une région nommé le Fünfseeland, le « pays des cinq lacs », au sud de Munich. Il y en a bien plus en réalité, chacun ayant des excroissances, des parasites, des satellites, mais on n’a dénombré que les plus importants. Le Starnbergersee est le premier d’entre eux. À tout seigneur tout honneur, j’ai commencé par lui, le dimanche 1er novembre.


Les journées sont courtes, le soleil est rasant. Aussi la lumière découpe-t-elle les plans et le soleil faut-il miroiter l’eau, sur laquelle se détachent les ors, ocres, les rouges, les bruns pâles des feuillages, l’argenté des roseaux et les silhouettes sombres des oiseaux. Le matin, une brume légère et mince flotte à la surface du lac et dans les vallées à l’horizon. Au dessus, s’élève, gris-bleu, la crête des Alpes. Lorsque le soleil se lève un peu, que l’atmosphère se réchauffe et que les brumes s’évanouissent, on distingue les glaciers, les neiges que le réchauffement climatique n’a pas encore faire fondre dans les Alpes Bavaroises. Ce lac est très grand, et il était hors de question d’en faire le tour : 54 km. Je me suis donc contenté d’une marche de quelques kilomètres sur sa rive ouest, le long de pontons et des joncs. La pause déjeuner s’est faite dans une grosse bâtisse blanches aux murs décorée de fresques, une Gasthaus chaude et tranquille qui offrait de délicats plats bavarois et suisses, parfaits pour la saison. L’estomac bien lesté, j’ai pu me hisser à l’assaut d’une hauteur surplombant cette rive, appelée l’Ilkahöle. La montée se fait tantôt à travers une forêt où les pas font bruisser les feuilles dorées qui tapissent le chemin, tantôt à travers des chants verts, gras, humides, éclatants de santé. Voilà qui donnerait presque envie d’être une vache pour aller les brouter. Il y en a à foison, des vaches, dans cette région : avant de les voir, on les entends meugler et l’on imagine le fumet de buée qui s’échappe alors de leur museau. Dans l’air flotte une odeur entêtante, grasse elle aussi, de fumier. Mais elle est diffuse, on n’a pas le nez dedans. Au fond, elle fait du bien à l’âme qui se sent vraiment loin de la ville. De là-haut, on a une vue encore plus belle sur les Alpes, la surface du lac, les échancrures de bois cramoisis, parfois un peu déplumés. Le chemin conduit à une église surmontée, comme souvent, d’un épais bulbe, où a lieu, dans le cimetière qui l’entoure, la cérémonie de la Toussaint. C’est comme pour les vaches, on l’entend, à cause de la musique, et surtout on la sent avant de la voir : l’encens y est consommé dans une telle quantité que l’odeur en était perceptible quelques centaines de mètres sous l’église. En contrebas de celle-ci, la jouxtant, se trouve à nouveau une Gasthaus, avec une terrasse qui fait office de Biergarten où les chopes s’entrechoquent joyeusement. On boit, on va à l’église, on reboit… Il ne reste plus qu’à redescendre avant la tombée de la nuit, donc avant cinq heures.

Aujourd’hui, c’était le tour d’un autre lac, le second en taille, un peu plus à l’ouest, l’Ammersee. Il est tout aussi facilement accessible que le Starnbergersee : comme pour son voisin, il est le terminus d’une ligne de S(Schnell)-Bahn qui traverse le centre de Munich. On y est, dans les deux cas, en trois gros quarts d’heure. C’est un peu comme si le RER nous conduisait directement en Sologne, avec vue sur les Pyrénées. Ce lac, de prime abord, est un peu moins séduisant que le Starnbergersee. Mais le soleil était souvent voilé. Le vent, qui avait soufflé très fort dans la semaine, avait enlevé la plupart de leur parure aux arbres qui entraient dans l’hiver. Il vaut néanmoins le détour, avec d’autres perspectives, et une épaisse forêt qui recouvre les hauteurs qui le bordent à l’est. Elle est plus sombre, bien plus humide encore que les bois du Starnbergersee : la mousse recouvre les troncs, les rochers, l’eau ruisselle de partout. L’humidité se respire, comme si la forêt était un lieu clos sur elle-même, pas aéré. C’est une véritable odeur d’humidité, parfois teintée de putréfaction : les tapis de feuilles se transforment en humus. Je l’ai traversée pour monter voir un monastère assez réputé, celui d’Andechs. On y jouit, là encore, d’une belle vue sur les sommets alpins. Ce lieu de pèlerinage assez ancien possède une église baroque de belle taille, comme il se doit richement décorée. Je dois me germaniser car j’ai apprécié ce décor vraiment luxuriant. C’est peut-être une question de lumière. Outre l’église, l’autre pôle d’attraction est la brasserie des Bénédictins, qui est dotée d’immenses salles, au plafond bas, où des centaines de personnes s’entassent pour boire cette fois ci pas moins d’un Maß de bière. Plusieurs terrasses permettent aussi d’accueillir des foules encore plus nombreuses de pèlerins. Ici encore, la piété et l’alcool font bon ménage. J’ai cependant suivi le conseil affiché dans la salle «souviens-toi que tu dois aussi rentrer chez toi» et n’ai pas bu de bière.

Ah ? Tiens, mais que font ces bouteilles dans mon sac à dos ?

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Ceux qui ne sont pas lassés peuvent voir d’autres photos ici.