samedi 19 décembre 2009

Noël Noël

La neige n’est pas bien épaisse, mais elle résiste et chaque jour elle saupoudre un peu la ville d’un fin manteau de dentelle blanche. Le spectacle est au fond enchanteur, quelle que soit l’heure de la journée. Il faut juste se barder de vêtements épais de la tête aux pieds: aujourd’hui, la température est descendue jusqu’à -10°, -15° au début de la nuit… La fréquentation des marchés de Noël prend alors une tournure inattendue. Je dis des marchés, car il y en a à peu près partout ; sur la place centrale, devant l’hôtel de ville (la Marienplatz) et les rues adjacentes, mais aussi derrière l’hôtel de ville et sur une constellation de places des environs, sans parler de ceux du Theresienwiese, de Schwabing… On y trouve bien sûr de quoi agrémenter Noël dans la gemütlichkeit de son intérieur, des foules de bougies, de décors, lumineux ou non, en bois, très souvent, mais aussi en fer (ainsi de petites scènes rassemblant à de soldats de plomb dont les Bavarois sont friands), des jouets pour enfants, des chaussons, des écharpes et des gants de laine et des cadeaux de toute sorte. La ville entière est un espace qui incite à fêter Noël par un monceau de cadeaux.

Le marché de Noël donne le la, avec son ambiance festive, mais tous les magasins sont richement décorés et offrent une incroyable profusion de décors de Noël comme on n’en verra jamais en France. Même les paquets cadeaux suscitent l’émerveillement tant la variété en est grande et tant l’imagination peut s’en emparer. On peut même les acheter feuille par feuille… La gemütlichkeit fait aussi partie de l’ambiance des (grands) magasins : au lieu de fliquer le client, on s’ingénie à créer une ambiance agréable, confortable, à lui faciliter la tâche. Il finit toujours par acheter. Ainsi, la grande librairie de la Marienplatz, outre un café, a en son centre un vaste ensemble de fauteuils, de coussins et de sièges pour que chacun puisse y lire tout son saoûl. À peu près tous les grands magasins ont leur café (et une incroyable tripotée de vendeurs et vendeuses), mais celui du magasin d’aménagement de la maison Kaufinger, avec sa cascade de gâteaux replets, trapus, colorés, ses sièges en cuir et son odeur de café italien tient le haut du pavé. Au dernier étage d’une sorte de Printemps de la Marienplatz, Ludwig Beck, se trouve le plus grand magasin de disques de musique classique et de jazz que j’ai pu voir. Non seulement le choix est immense, la présentation soignée (et les prix normaux), mais absolument tous les disques peuvent être écoutés sur de véritables platines, avec de bon casques, à la volonté de chacun. La plupart des disques ne sont pas scellés et les livrets n’ont bien sûr pas disparu. Confiance, confort, qualité du service… La meilleure voie pour consommer de façon déraisonnable et avoir envie de se charger de cadeaux.

Pour achever de vous faire oublier toute préoccupation comptable, il y a ce qui constitue, au fond, l’essentiel des marchés de Noël : à boire et à manger. Tout d’abord le vin chaud, Glühwein, dont l’odeur envahit la ville, dès la sortie du métro – comme les intérieurs des bureaux, car on en boit lors des Weihnachstfeiern qu’on y organise (ainsi dans mon institut de recherche). Il se consomme debout, dans des tasses en céramique à n’importe quelle heure. Tout autour des débits de Glühwein (ou de punch chaud) se trouvent des petites tables ou des comptoirs pour s’accouder, parfois surmontés de petits toits, comme dans les Imbiss, ces petits endroits où les Allemands mangent le midi debout un plat modique et roboratif. Le nombre de stands de nourriture est tout simplement sidérant. Bien sûr, la saucisse grillée règne dans son petit pain rond, le Semmel, avec toutes ses variétés - beaucoup de bio. Mais on peut aussi manger du porc rôti avec des frittes, des Semmel aux harengs de la Baltique, au pâté de foie, des Schumpfnudel, sortes de gnocchis fins (pas du tout bleus), souvent mélangés avec de la choucroute, une profusion de desserts, Strudel variés, crêpes, diverses sortes de gaufres, de beignets, les Dampfknödel, des boulettes de farine (je n’ai pas essayé, ce sont des boules grosses comme des melons, noyés dans une sauce vanille), des fruits glacés dans le chocolat, des bombons, des pains d’épices, des Stollen (les brioches de Noël), toute sortes de pains d’épices, dont ceux, en forme de disque recouvert de chocolats noir (les traditionnels Lebekuchen) ou encore le fameux Kaiserschmarren (là, cherchez un peu !). Bref, on est souvent là pour manger, à toute heure, debout, sur les tables, en société, avec joie, les paquets de Noël posés aux pieds, dans la poudre blanche. De prime abord, cela paraît écœurant, mais avec un tel froid, je vous assure qu’un plat de Schumpnudel puis un petit Kaiserschmarren passent comme une lettre à la Poste (du temps du service public).

J’ai été bien long, mais le blog entre pour quelque temps en hivernage. Vous pouvez en attendant regarder quelques photos prises aujourd’hui ici. D’ici là, joyeux Noël à tout le monde et à l’année prochaine !

vendredi 18 décembre 2009

Étudiants, diants, diants, la suite


Les étudiants allemands arriveront-ils à obtenir gain de cause et à abattre le processus de Bologne ? S’il est difficile de deviner la suite des événements, j’en doute. Ils sont certes efficaces et bien organisés. La protestation passe naturellement par des manifestations mais aussi l’occupation des Audimax, les grands amphis des universités allemandes. Le mot d’ordre est « Unser Uni Brennt » (notre université brûle) mais l’inventivité des banderoles est presque infinie.
Ici celle qui figurait fin novembre dans le hall de la « nouvelle université » de Heidelberg, où l’on appréciera la dénonciation des notes en bas de page (« vous avez remplacé les philosophes par les bureaucrates/la pensée par les notes en bas de page/l'esprit par les boîtes à archives»).

L’occupation des Audimax est symbolique et ne nécessite pas un grand nombre d’étudiants. Mais ils ne sont pas délogés pour autant des locaux. Je ne connais qu’un seul contre-exemple, Tübingen. Même en Autriche, où les occupations sont totales (on dort et mange même dans les centres de recherche) et posent bien des problèmes, à ma connaissance, on ne déloge pas les étudiants. C’est qu’en Allemagne (au moins) les recteurs ne sont pas des agents du pouvoir mais des universitaires élus par leurs pairs dans chaque université. On comprendra qu’ils hésitent un peu à demander l’envoi de la troupe, comme on le fait si souvent en France. Pire, ils négocient et discutent avec les étudiants : l’occupation des Audimax s’est la plupart du temps faite avec leur accord. Discuter au lieu de taper, quel mauvais exemple !

Cela dit, le mouvement me semble (de façon empirique) plutôt minoritaire. Le nombre d’étudiants occupants et mobilisés ne paraît pas très impressionnant. A en juger par leurs modes d’actions, leurs revendications et la phraséologie, je dirais que l’on a affaire aux habituels étudiants d’extrême gauche et de leurs sympathisants. Calmes, policés, mais très déterminés. Il y avait, il y a trois semaines, une réunion à Munich pour la rédaction d’un appel européen. Des groupes de travail se sont réunis pour le préparer et le voter dans l’Audimax. Je suis allé y faire un tour le samedi. On mange, on dort dans l’amphi, bariolé de banderoles. Je n’y suis resté que quelques vingt minutes, assez instructives au demeurant. On y discutait longuement de l’usage des photos: allait-on autoriser les photographies de l’ensemble de l’amphi, totalement les interdire ou les autoriser seulement pour un coin de l’Amphi et si oui lequel et selon quelles modalités ? Chaque proposition est approuvée en silence on n’applaudit pas, on lève les deux mains en les agitant, « ainsi font font, les petites marionnettes »… On est loin du chaudron des AG françaises. La discipline est en apparence plaisante, mais le spectacle ridicule. On voit bien qu’elle n’empêche pas les discussions de s’ensabler dans l’anecdotique, dans le pinaillage dont raffolent les militants professionnels, les intégristes du combat.
Comme on peut le constater, je n’ai pas attendu le résultat du vote et n’en ai fait qu’à ma tête. Je suis toujours vivant. De cet appel, fort peu européen dans sa rédaction, je parierais qu’il ne sorte pas grand chose et que le mouvement n’obtiendra pas beaucoup.

À moins que… les Allemands sont surprenants. Les négociations en cours ont déjà donné quelques résultats : une partie des revendications concernant l’accès au Master pourrait être entendue. Le reste est une épineuse question d’argent ou tellement utopique que personne ne pariera sur leur réussite. Cela dit, le Président de la République (vous lisez bien), Horst Köhler, a prononcé assez récemment un discours dans lequel il disait comprendre les revendications et dénonçait le sous-investissement allemand dans les universités – pourtant bien moins grave qu’en France. On échange ?

jeudi 17 décembre 2009

Étudiants, diants diants


L’Allemagne est en ce moment secouée par un assez important mouvement de protestation étudiante, qui a pris sa source en Autriche et a trouvé des échos notamment en Suisse. Les revendications sont multiples : face aux frais d’inscription – plus importants qu’en France – on souhaite la gratuité complète des études, une hausse des moyens alloués à l’université ; un libre accès au Master sans sélection préalable ; enfin, la mise à bas du « processus de Bologne », nom donné à l’harmonisation européenne des cursus, mise en œuvre depuis environ une dizaine d’années. C’est le système connu en France sous le nom de LMD, Licence-Master-Doctorat, en Allemagne Bachelor-Master-Doktorat. Il y en a sous doute d’autres ferments, notamment en Autriche, que je ne maîtrise pas du tout.


Les revendications me paraissent en grande partie justifiées. Si les frais ne sont malgré tout pas très élevés, ils posent problème aux étudiants les plus modestes, d’autant plus que les bourses mensuelles ne dépassent pas 400 euros par mois. La gratuite totale est en revanche une illusion assez démagogique. Il y a eu quelque expériences d’abandon des frais, mais l’université y a alors perdu une grande part de ses ressources alors que le nombre d’étudiants a considérablement augmenté (c’est un des problèmes autrichiens). Vous imaginez la qualité de l’enseignement que l’on peut dispenser dans ces conditions. L’accès automatique au master (donc au diplôme de bac plus 5) me semble encore plus démagogique – et un rien contradictoire quand on a protesté contre l’allongement de la durée du premier diplôme de 2 à 3 ans.


Mais c’est un point de vue d’enseignant. Nos critiques ne sont pas les mêmes, je partagerais plutôt celles des enseignants allemands avec qui j’ai pu discuter. Le processus de Bologne est censé faciliter les échanges entre étudiants européens en harmonisant diplômes et rythmes de vie. En Allemagne, en vertu de la structure fédérale, il a été instauré indépendamment dans chaque Land. La diversité des solutions adoptées est telle que les échanges entre étudiants de Länder différents est devenue bien plus difficile qu’avant la réforme. Comme l’autonomie des universités n’est pas ici un attrape-nigaud, chaque université a concocté ses propres pâtes bolognaises, indigestes pour la voisine. Voilà comment on créée un capharnaüm européen. Bien plus, les enseignants se plaignent, comme nous, d’être devenus des machines à faire passer des examens et à donner des notes, comme de la logique de plus en plus consumériste des étudiants, qui vont à la chasse aux crédits et non au savoir. Ils dénoncent la bureaucratisation de la recherche, le manque de moyens, la mise en concurrence frontale et brutale des universités et des universitaires. La concurrence n’est pas un mal en soi si elle se traduit par une émulation. En Allemagne, comme chez nous (et pire, chez les Anglos-Saxons), elle se manifeste par une inflation exponentielle des publications, inversement proportionnelle à leur qualité, à la constitution, ou à la prospérité d’un groupe de super-Professeurs, super-payés, qui doivent leur place bien moins à leurs qualités professionnelles qu’à leur capacité à s’insérer dans le système de pouvoir, et en particulier dans le réseau de ceux qui évaluent les universités : un petit groupe est ainsi employé (et grassement payé) dans les agences (privées) qui notent les universités réclamant le statut d’excellence. Un de mes interlocuteurs y voit la mise en place d’un véritable système de corruption. Il y a au moins une confusion des genres et un groupe de cumulards que nous connaissons fort bien, et depuis longtemps, en France. De ce côté-ci du Rhin, les enseignants ne se révoltent pas, contrairement aux étudiants, qui n’ont, au fond, pas les mêmes griefs. Le Professeur allemand ne proteste pas, par atavisme, sans doute, mais aussi par ce qu’il est Herr Professor, un homme puissant, un privilégié qui a lutté pour obtenir cette place. Il n’existe pas d’équivalent de notre vaste corps intermédiaire des maîtres de Conférences (Dozent ici), qui a mené la révolte l’an passé. Nous savons bien que s’il avait fallu compter sur nos Professeurs à nous, l’université serait restée paisible et ils seraient presque tous allés à la mangeoire.


Quoi qu’il en soit, le processus européen en cours est pour la plupart d’entre nous, des deux côtés du Rhin, un vrai désastre. Le couple semestrialisation-Bologne est, à mes yeux, d’abord une catastrophe pédagogique, avant de porter en germe l’abaissement des niveaux de l’enseignement comme de la recherche dans toute l’Europe, voire une destruction de ce que notre système a de meilleur. L’atomisation, la culture du zapping, le goût de la vitesse au détriment du mûrissement, le consumérisme atteignent les étudiants comme les enseignants. Certains de mes amis socialistes défendent encore le processus, car il fut lancé par eux et parce qu’il aurait été saboté par le manque de moyens alloués. Le second point est juste, mais, vu d’ici encore plus qu’en France, on voit surtout l’œuvre d’un rabot bureaucratique et dogmatique, qui n’a jamais pris en compte la réalité des structures existantes ni fait confiance au pragmatisme – aggravé par le libéralisme ambiant . Un processus assez jacobin, donc français dans sa conception. Non, il n’y a pas lieu d’en être fier, comme de savoir que l’infatué Claude Allègre en a été un des maîtres d’œuvres.

mercredi 16 décembre 2009

Kinder surprise

Voilà comment on traite désormais les enfants en Allemagne:


Et l'on s'étonne qu'ils aient des problèmes de démographie!

lundi 14 décembre 2009

Das Wetter in Bayern (II)


L’attaque du général Hiver


Il a pris son temps, mais il est là, avec une belle première salve: une neige qui tient depuis vendredi, grâce au gel qui s’est installé. Le thermomètre stagne entre zéro et moins 7. La neige crisse sous les pas, mais elle durcit et n'est plus propre à la confection de boules.

C’est surtout le temps des bonnets, de ski, en laine à pompons ou andins, des chapeaux et des chapkas. Cela dit, de nombreux Munichois(e)s ne semblent pas encore trop craindre le froid puisqu’on les voit sortir la tête juste recouverte de leurs cheveux. Les bottes règnent chez les femmes, alors que les pieds des hommes, contrairement à leurs têtes, ne sont pas encore trop rentrés dans l’hiver. Ce ne sera pas mon cas !

*

Cela n’a rien à voir, mais je viens de lire ici une belle diatribe qui exprime mieux que je ne l’ai fait ce qu’on penser d’Astérix nouvelle manière.

vendredi 11 décembre 2009

Alexandre le Grand à Heidelberg


La réunion des nouveaux boursiers de la Fondation Humboldt se tenait cette année fin novembre à Heidelberg (Rhénanie-Palatinat). Pendant trois jours, réunions solennelles, discussions en groupes de pays plus ou moins voisins (on met ainsi la France avec l’Italie, l’Espagne, la Roumanie et… la Géorgie), par groupes de disciplines là encore plus ou moins voisines se succèdent. Nous étions accueillis dans les locaux de l’université de la ville : les plus anciens sont en plein centre ville dans de trapus bâtiments en grès rose. Le « grand amphi » local (Alte Aula) est une longue salle rectangulaire surchargée de boiseries et de vieux lampadaires en fer forgé qui nous transporte dans l’université du milieu du XIXe siècle. Mais l’université est dotée de locaux, souvent très modernes dans toute la ville qui est une petite ville avant tout universitaire.
La panel de chercheur est révélateur : moins de 20 % proviennent des sciences humaines et sociales. Un contingent très impressionnant de Chinois et d’Indiens forme le gros des bataillons dans les sciences dites exactes et les « sciences de l’ingénieur ». Mais il n’est guère de pays qui n’aie de boursiers : j’ai croisé, discuté notamment des Italiens, des Français, des Britanniques, des Espagnols, une Luxembourgeoise, une Bulgare, un Géorgien, un Tchèque, un Hongrois, des Roumains, quelques Américains des USA, des Brésiliens, des Indiens, un Ouzbek, un Grec, un Turc (qui ont fait ami-ami)… Si, dans les sciences humaines, tout le monde comprend et parle l’Allemand, ailleurs on ne parle qu’anglais. Les universitaires allemands sont même de fins anglophones, mais ils en viennent à ne même plus songer à employer leur propre langue : le discours inaugural de la représentante de la Fondation s’est fait exclusivement en anglais ; les courriels sont bilingues, mais parfois seulement en anglais (ainsi pour le «club des Humboltiens de Munich») et le responsable d’un gros programme de recherche en histoire à Heidelberg nous a d’emblée présenté le projet en anglais, alors que l’intégralité du groupe maîtrisait très bien l’allemand ; il ne s’est même pas posé la question. Cela n’étonnera personne, je fus des râleurs. Et l’allemand revint.
Les conditions de séjour valent la peine d’être racontées. Nous avons dîné le premier soir dans un des restaurants les plus chers de la ville, au « Ritter », dans une imposante bâtisse, une des seules à avoir survécu, dit-on, au sac de la ville, à la fin du XVIIe siècle, par les troupes bien intentionnées de Louis XIV. Les Français que l’on voyait alors à Heidelberg étaient là pour piller, violer et brûler. Il semble que l’on ne nous en tienne pas trop rigueur. Le lendemain, le dîner avait lieu dans un luxueux restaurant qui domine la ville, au-dessus de la forêt et des ruines du château (détruit par qui vous devinez), à l’aplomb de la vallée du Neckar. Il faut imaginer que ce sont à chaque fois environ 200 couverts qui sont payés, auxquels s’ajoutent les pauses café et thé, pourvues en abondance en gâteaux de toute sorte.

Mais le nec plus ultra était le logement à l’hôtel Europäische Hof, un 5 étoiles, le plus coûteux de la ville. Un véritable grand hôtel, avec un personnel nombreux, stylé, un piano bar, une salle de sport, un spa, un grand restaurant et des chambres comme jamais un universitaire n’en connaît dans sa vie professionnelle – et ne peut s’en payer dans sa vie privée. Nous n’avions bien sûr pas les meilleures. Mais jugez-en par un inventaire : assez vastes, lumineuses, avec un éclairage sophistiqué assorti d’une multitude de glaces ; un coffre-fort, un mini-bar, une connexion Internet pour portable ; une télévision grand-écran plat avec connexion Internet (le clavier est fourni), vidéo à la demande (y compris films porno allemands…), de l’eau minérale à volonté, un chocolat sur l’oreiller ; un appareil à repasser (verticalement) les pantalons, un nécessaire à couture, de quoi nettoyer ses chaussures, mais aussi un service gratuit de cirage (jusque 2 heures du matin), ou payant de nettoyage de vêtements ; peignoir de bain et chaussons sont également fournis ; la salle de bain est munie d’un téléphone, de distributeurs de mouchoirs en papier (à chaque fois pliés en biseau pour marquer leur caractère propre), de divers produits de bain, de cotons-tiges, d’un miroir grossissant (pour se maquiller, se raser ou se percer avec joie et précision les boutons), d’une baignoire avec double système de douche et surtout remous… Le petit déjeuner est potentiellement le plus pantagruélique que l’on puisse imaginer : jus de fruits frais pressés, dans des carafes posées dans la glace, œufs et bacon, saucisses, weisswurst bien sûr, avec ses moutardes, charcuteries, y compris boudin (si si), harengs marinés (il faut oser), fromages frais et secs, choix de yaourts, de fromages blancs frais ou aux fruits, compotes ad hoc, muësli à composer soi-même à partir d’un grand choix de graines et de fruits frais et secs, beurre, croissants, petits gâteaux, toasts, brioches, pains de toute sorte à couper soi-même en les tenant via une serviette immaculée, confitures maison, Nutella, choix de miels et j’en oublie ! Il est bon pour la ligne que ces rendez-vous ne se prolongent pas trop.
Les vacances scientifiques se prolongent par une visite de la ville, très unitaire puisque reconstruite après les ravages de mes compatriotes. Grâce à nous, Heidelberg est une admirable petite ville baroque (et relativement sobre), dominée par une sorte de grès rose et des crépis aux teintes vives. Comme il semble que la Fondation me paye pour travailler, je m’arrête là : les curieux pourront voir plus d’images ici.

jeudi 10 décembre 2009

Alexandre le Grand


La princesse qui me paie les frais de séjour à Munich s’appelle la Fondation Alexander von Humboldt. Naturaliste et voyageur du XIXe siècle, il est aussi le frère de Wilhelm von idem, le fondateur de l’université allemande. Dans son état actuel, la Humboldt-Stiftung date de sa refondation en 1953. L’institution n’a pas de parallèle en France : son financement est essentiellement public : ce sont les ministres des affaires étrangères et de la recherche qui lui allouent la quasi totalité de ses fonds. Plusieurs centaines de chercheurs du monde entier se voient chaque année allouer des bourses de 6 à 24 mois, qui permettent de vivre presque confortablement en Allemagne. La Fondation finance au total 1 800 chercheurs. L’institution qui les accueille, université ou centre de recherche, reçoit en plus des fonds pour compenser les frais induits par la présence du boursier (Stipendiat) et pour lui payer ses frais de déplacement, d’achats de matériel, de livres, etc. La fondation souhaite attirer ainsi des jeunes chercheurs en Allemagne, promouvoir les échanges entre chercheurs allemands et étranger, irriguer le système de recherche allemand. C’est une habile politique diplomatique, qui participe au rayonnement de l’Allemagne et à la diffusion d’une meilleure image du pays... Voilà pourquoi la Fondation dispose de moyens très impressionnants. Car les chercheurs disposent, en plus de la bourse, de bien des avantages : payement des frais d’assurance, subvention pour déménagement, paiement de cours d’allemand intensifs au Goethe-Institut (jusqu’à quatre mois), etc. La fondation organise de nombreuses rencontres annuelles en Allemagne pour tous ses boursiers (j’y reviendrai), tous frais payés, et même au mois d’août un « tour d’Allemagne » de quinze jours. On nous offre revues, dictionnaire, guide, cartes, agenda, stylos, pin’s et cravate de la Fondation ! Tout est donc fait pour nous germaniser. Avec succès ? C’était sans compter l’écrasante domination de l’anglais, qui s’insinue partout en Allemagne et est devenue une lingua franca.


Mais je ne boude pas mon plaisir et je tremble à l’idée qu’un sbire du gouvernement français apprenne qu’il est un pays voisin et ami où l’État paye dignement des chercheurs, avant tout étrangers, en leur offrant de splendides conditions de travail et une liberté de recherche totale sur le sujet qu’ils ont choisi. Quelle horreur ! Fort heureusement, c’est totalement impossible chez nous.

jeudi 3 décembre 2009

Astérix et les Gogos

C'est un bref message, car je n'ai guère le temps d'alimenter le blog en ce moment. J'ai évoqué en octobre les 50 ans d'Astérix, qui a donné lieu, en Allemagne comme en France, à de multiples célébrations. Est sorti à cette occasion un album spécial, simultanément en France et en Allemagne et sans doute dans bien d'autres pays. La version allemande est strictement identique à la version française, sauf qu'elle est allemande. Je l'ai trouvé consternante et ce n'était pas l'effet de l'allemand, l'album français est tout aussi médiocre. N'achetez pas ce machin! On le savait depuis un bout de temps, mais cela vérifie deux adages:
- Une bonne BD, c'est d'abord une bonne histoire. Uderzo est un bon dessinateur, mais il est un scénariste lamentable et la mort de Goscinny il y a trente ans est une perte irremplaçable.
- La vieillesse est un naufrage...

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Rien à voir: le sondage est arrêté presque sur une égalité. Certes, il y a plus de oui (33 %) et de Ouiii! (16 %) que de non (16 %), donc une majorité apparente d'obsédés, mais il y a aussi 33 % de "je me tâte" - faut-il les considérer comme des hésitants ou comme des obsédés pratiquants?

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Pour finir, une question: où est-ce?