mardi 30 novembre 2010

KZ Dachau (3)



Le gros bâtiment administratif est un héritage de l’ancien camp. On peut y découvrir certaines pièces en l’état, avec par exemple cette interdiction du fumer. Partir en fumée oui, s’en griller une, non.

On y trouve surtout une remarquable exposition sur l’histoire du camp. Replacée dans son contexte général de l’Allemagne nazie, elle est d’une très grande précision. Une impressionnante quantité de témoignages la nourrissent, associés à une non moins grande moisson de documents. La fort germanique bureaucratie a généré une paperasse, plans, comptes, lettres, dossiers divers, que l’on a pu en grande partie sauver de la destruction. La plongée n’est pas facile : c’est toujours pire que ce que l’on imaginait ou croyait savoir.

On possède aussi des réponses à certaines questions fort importantes, comme celle-ci : les Allemands, ou disons les Bavarois de Dachau savaient-ils ? Oui. Les prisonniers sortaient pour des travaux divers, à Dachau même et dans toute la Bavière. S’ils ne connaissaient pas forcément les détails de la vie intérieure du camp, ils ne pouvaient ignorer que ce que l’on faisait subir aux gens qui y étaient enfermés était ignoble. C’est donc avec des sentiments mauvais que l’on voit le film, tourné au printemps 1945, qui montre les soldats américains, révoltés parce ce qu’ils ont découvert, contraindre les habitants de la paisible bourgade à aller contempler les amas de corps et le crématorium. Il en est d’impassibles , de gênés et d’autres tout de même bouleversés.

De la visite du camp, on ressort avec des sentiments mêlés. D’abord profondément ému. Presque écrasé tant l’horreur s’y rencontre à chaque pas. Épuisé par ces émotions. Instruit, certes, mais d’un fort amer savoir. Abasourdi, avec cette lancinante question, qui ne cessera de se poser : comment cela a-t-il été possible ? Comment un pays qui se voulait si avancé a-t-il pu plonger si loin dans la folie ? La colère vient, encore et toujours.

Je connais des esprits qui trouvent que « les Allemands nous font chier avec leur culpabilité » et qu’ils en font trop. Ils n’en feront jamais trop.

*

J’ai mis en ligne des photos d’une meilleure définition ici.

lundi 29 novembre 2010

KZ Dachau (2)

Au bout du camp, on passe à travers une nouvelle reconstitution, celle du système de barbelés et de fossés qui empêchaient les prisonniers de sortir. Beaucoup y moururent, soit en voulant s’échapper, soit en y étant piégés par la perversité des gardiens : 40 000 personnes sur 200 000 prisonniers. Ce qui suit est d’époque : les fours crématoires.

Dachau était un camp de concentration, par d’extermination comme Auschwitz, c’est entendu. On y a entassé opposants politiques, Juifs, prêtres, tziganes, prisonniers de toutes nationalités, notamment russes. Tout ce monde était soumis à un arbitraire total, et, en vertu de cela, terrorisé, battu, maltraité, mal nourri, exploité par des travaux harassants, souvent exécuté froidement par les gardiens du camp. À Dachau comme ailleurs, des médecins sans âme ont pratiqué nombre d’expériences sur les prisonniers. Leurs victimes trouvaient une mort précédée de longues souffrances. Le prisonnier était aussi soumis à un règlement pervers et déshumanisant, appliqué avec une brutalité et un sadisme de chaque instant ; en vertu de celui-là, on était tout autant terrorisé, battu, exécuté, etc. L’organisation du camp – le premier à avoir été ouvert – a même constitué le modèle de tous les autres camps de concentration allemands ; les officiers SS ayant dirigé des camps y étaient souvent passés : on parlait de « l’école de Dachau ». La folie unissait l’arbitraire et la maniaque logique réglementaire. On mourait donc en masse à Dachau, de maladie (le typhus faisait rage), de mauvais traitements ou de la volonté de tel SS. Les survivants devaient se charger de détruire par le feu le corps de leurs camarades dans un crématorium. Le premier, construit en 1940, fut vite insuffisant, étant donné l’aggravation de la mortalité qui sévissait dans le camp. On en construisit un second, plus grand, plus moderne. On possède même quelques photos le montrant en fonctionnement.

Dans le crématorium se trouvent aussi une salle de déshabillage et une chambre à gaz, fonctionnelle. On ne possède pas de preuve directe de ce qu’elle ait fonctionné comme lieu de mort. Mais pourquoi diable a-t-elle alors été construite ?

La distinction entre camp d’extermination et camp de concentration tient dans ce que le premier était construit précisément dans le but d’anéantir ceux qui y étaient conduits. Mais la limite est ténue, quand les seconds, comme on le voit à Dachau, n’étaient pas loin de parvenir à ce même résultat.

Autour de ces bâtiments se trouvent les fosses communes où l’on a jeté les corps par centaines, notamment quand il n’y eu plus assez de charbon pour le crématorium. On marche sur les morts. Le visiteur sort de cette partie du camp en chancelant.

Le malaise m’avait vite saisit : comment peut-on visiter cet endroit, comme on découvrirait un château ? Que fait-on ici, avec guide et sac à dos, au milieu de dizaines d’autres gens multicolores, presque comme dans un haut-lieu du tourisme de masse ? Ce moment m’a apporté une réponse : cela m’était nécessaire. On peut malheureusement douter qu’il en soit ainsi pour tous les visiteurs. J’ai vu des groupes se faire prendre en photo devant le panneau « Krematorium » et même l’un d’eux s’appuyer devant l’entrée du premier four crématoire, avec un large sourire, triomphant, en demandant à ses amis de le photographier ainsi. Shoahpark… La bêtise est n’a pas de limites.

dimanche 28 novembre 2010

KZ Dachau (1)


Dachau est l’endroit où se situe un des camps de concentration les plus connus. On s’y rend en quelques minutes, par le bus, depuis la gare de la bourgade voisine.

La visite du camp est organisée de façon remarquable. On n’en ressort pas indemne, c’est entendu. Mais l’ignorant est édifié et celui qui sait n’en saura jamais assez.

Il subsiste peu des rails qui conduisaient dans le camp les wagons plombés bondés de déportés. C’est que la partie où ils se situaient, l’ancien caserne des SS, est désormais occupée par la gendarmerie bavaroise. Une ironie amère nous guette. Il n’y a cependant pas de solution de continuité entre les deux occupations du lieu.

L’entrée se faisait par le bâtiment appelé Jourhaus, encore debout, qui abrite la grille de fer au cynique et célèbre slogan, Arbeit macht Frei. Est également d’époque le bâtiment administratif, qui abritait aussi divers ateliers où l’on exploitait les prisonniers. À part les édifices spéciaux dont je reparlerai, il ne reste presque rien du camp, qui a pourtant été en activité douze ans durant (22 mars 1933-29 avril 1945). Des baraquements, on ne voit que la trace à même le sol, les contours gris, assortis parfois de fleurs. Tout a été détruit. C’est que le camp a beaucoup servi – y compris pour y enfermer les prisonniers nazis en 1945, ou pour accueillir les Allemands réfugiés en Bavière au lendemain de la guerre. On a surtout mis du temps à comprendre la nécessité d’en garder le souvenir. Il faut dire que, pendant près de vingt ans, les Bavarois et la Bavière ont opposé une extrême mauvaise volonté au désir des survivants de faire du camp un lieu de mémoire. Oublier, effacer plutôt que de stigmatiser. On voit que l’Allemagne a mis du temps à se regarder en face – elle n’est pas la seule, certes, et le portrait était pire que celui de Dorian Gray. Ce sont les anciens prisonniers qui l’on emporté et qui ont fait de ce camp ce qu’il est désormais, un terrible et nécessaire lieu de mémoire et d’histoire.

Deux baraquements ont été reconstitués à l’identique. Pas plus. Juste ce qu’il faut, avec les témoignages écrits et oraux pour prendre la mesure de l’entassement des prisonniers sur les lits en bois, la promiscuité, l’effarant nombre de personnes qui s’entassaient de plus en plus, comme jamais on ne traiterait même du bétail.

Le camp est un lieu du souvenir pour les survivants. Aussi y a-t-il été édifié une sinistre sculpture en mémoire de ceux qui y sont morts, en forme de barbelés. Mais les religions s’en sont aussi emparées. On y trouve ainsi une chapelle juive, un carmel, une chapelle catholique – les prêtres polonais ont été déportés ici en nombre –, une autre, protestante, et même une église russe en bois. On peut penser à de la récupération. Mais beaucoup de prisonniers enfermés ici étaient simplement persécutés à cause de leur foi. Chaque religion y entretient ainsi sa propre mémoire.

samedi 27 novembre 2010

Un si joli village

A une quarantaine de kilomètres au nord de Munich se trouve une délicieuse bourgade. On s’y rend en vingt minutes par le S-Bahn, qui constitue une sorte de RER munichois – en plus fiable. Le vieux centre est situé sur une hauteur qui offre une vue très dégagée vers le sud, sur Munich, ses toits, des églises, les vertes campagnes qui l’entourent, et, dans le lointain, les Alpes bavaroises. Bien entretenues, son église, les façades colorées de ses maisons cossues charment l’œil et incitent à la flânerie. Cafés et brasseries offrent des cartes de produits bavarois de saison, à consommer en terrasse. Le service est souriant, attentionné, gentil.

Un petit château baroque (Schloß) occupe une part de la colline du bourg. Au soleil, sa façade blanche et jaune illumine le jardin qu’elle surplombe. On y respire la paix, au milieu des rosiers et des rectilignes chemins abrités par des tonnelles ou par des branchages qui leur forment un toit.

Le nom de ce havre est Dachau.

mercredi 24 novembre 2010

Le général hiver, saison 2 : (1) il se la coule douce



Voici les premiers flocons ! Un mois plus tard que l’an passé (ici ). L’automne est pourtant bien moins clément qu’en 2009. Sauf exceptions (ici ou ), il est froid et humide, mais jusqu’à cette nuit, sans neige sur la ville. Chaque semaine, on ajoute une pelure d’oignon pour sortir, mais on ne prend pas garde à mettre des chaussures tout terrain. Le froid est cependant descendu assez bas pour qu’il neige cette nuit et un petit peu encore aujourd’hui. Une fine couche recouvre les voitures.

Mais elle est bien mince et, à 8 heures, elle fondait déjà, ne laissant que de petits restes. Ils ont presque disparu. Voilà un bien timide général hiver ! Faut-il en conclure que l’hiver sera doux ?

Que nenni ! Je lis sur le blog d’une journaliste qui vit à Berlin (dont je reparlerai : ici) que les Russes prévoient que cet hiver sera le pire du siècle – passé bien sûr. (Évitez les sarcasmes sur le réchauffement de la planète : la moyenne des températures du globe a été, pour la période janvier-octobre 2010, la plus élevée du siècle.) Bild, le journal à sensation qui aime nous faire peur, le confirme (ici) et revient à la charge (). Mais comment donc le savent-ils ces Russes ? La vodka aurait-elle commencé à geler en Sibérie ? C’est peu probable, l’alcool ne gèle qu’à -114°.

Vous lirez sur Bild et ailleurs les explications scientifiques. Je me demande si ce n’est pas un mauvais coup des Tchouktches ou des Yakoutes (non, ils ne sont pas Bulgares). Ils tromperaient le Russe de la toundra (parce que le chaman) comme naguère l’Indien du grand nord canadien avait trompé le trappeur blanc. Ce dernier se préparait à l’hiver en coupant du bois. Mais il voulait ajuster la quantité de bois coupée à la rigueur éventuelle de l’hiver. Il alla interroger un indien voisin, confiant en sa sagesse ancestrale et en sa connaissance de la nature : « l’hiver sera-t-il rude ? ». « Oui », répondit le Huron. Le trappeur se remet alors à couper du bois avec entrain. Mais combien faudra-t-il en couper en plus ? « Rude », c’est bien vague. Il retourne interroger son Indien : « à quel point l’hiver sera-t-il froid » ? « Oh, très froid, je pense ». Et le trappeur de recouper, recouper. Et de se poser la même question : jusqu’à quand couper ? Interrogeons l’indien si savant. « Très, très froid, l’hiver sera » répondit Yoda. « Mince ! » s’exclama le trappeur qui repartit de plus belle abattre des arbres et les débiter en rondins, puis en bûches. Épuisé, il se demande s’il peut s’arrêter et interroge à nouveau l’Indien qui répond que l’hiver sera terrible. Le trappeur coupa à s’en faire éclater les paumes des mains et coupa tant de bûches que sa maison disparu derrière elles. À bout de forces, il rampa vers l’Indien, pour savoir si cela suffisait. Celui-ci lui répondit « Le plus froid du siècle, l’hiver sera ». Désespéré, le trappeur lui demanda comment il pouvait effectuer cette prévision. « Simple cela est. Quand visage pâle couper bois, froid hiver sera ».
Alors, les prévisions russes… Sur ce, je vais m’acheter des pulls. On ne sait jamais.

vendredi 19 novembre 2010

Les délices de la traduction automatique

Les hasards m’ont mis en contact avec trois effets amusants de la traduction faite à l’économie, notamment par la traduction automatique de M. Google.

Le moins drôle est sans doute ce texte destiné à présenter le cirque des puces de l’Oktoberfest. Pas trop de fautes, mais un étrange nom pour la ville qui l’accueille : Munique. Traduction phonétique.

Un peu plus amusant, cette page sur la cuisine bavaroise (ici). Admirez-en le style avec cet extrait :

« La cuisine de Bavière est l'ensemble d'assiettes et habitudes de la région de Bavière (l'Allemagne) et un des éléments plus identificadores de la cuisine allemande du sud. Il s'agit d'une il cuisine basique, fondée dans le goût des laboureurs qu'ils jadis soignaient les champs de Bavière. Les caractéristiques plus générales de cette cuisine bávara est l'abondante viande especiada, fréquemment servie rôtie, les assiettes de pâte et de farine.

À l'égard des influences de cette cuisine il se peut commenter que ses racines se partagent entre otars cuisines voisines à la région. De cette forme sepuede distinguer une cuisine de franconia, ainsi que la cuisine de suabia comme des éléments indispensables de la cuisine de Bavière. Une habitude bávara très fréquente est le dénommé Brotzeit, que se réalise dans bien des Imbiss, et est un 'arrêt' entre le petit déjeuner et le petit-déjeuner dans lequel se mange un apéritif. »

Dans la liste qui suit, j’ai aussi un faible pour « Entrantes », au lieu des « entrées ». Tout cela semble traduit d’une langue ibérique.

On dira que ce sont les lois du Net et l’on pourra en citer des centaines d’autres exemples. Voici donc pour finir mon préféré, photographié en septembre dernier à Athènes, sur le menu d’un restaurant à touristes situé devant l’ancienne agora.

La pauvre huile, qui n’était pucelle qu’elle était, tomba en consomption. Quelle salade !

samedi 13 novembre 2010

Ça sent le sapin


13 novembre.Le föhn souffle sur les Alpes et enveloppe la ville d’un manteau tiède. Le soleil illumine les bulbes, les toits et les flèches qui se détachent sur un ciel d’un bleu éclatant. Le Viktualienmarkt est plein à craquer, de gens affairés, de visages réjouis par le beau temps et surtout de buveurs attablés dans les Biergarten. qui écoutent les flonflons d’un orchestre bavarois. Revoilà enfin l’été indien.

Mais si l’on quitte le marché, on saute une saison plus loin. Voici la façade du grand magasin Kunstermann (siège d’une formidable café dont j’ai parlé ici), telle qu’elle se présente depuis la fin du mois d’octobre. Elle nous présente ses « Meilleurs vœux de Noël ». Les patrons sont-ils fous ? Pas le moindre du monde. On éprouve la même impression devant la vitrine du temple de la papeterie, dit « Kabuco », - avec une touche très bavaroise, le trophée de chasse -, ou à l’intérieur du même magasin, avec ses boules de Noël au plafond, et l’abondance des papiers d’emballage et des éléments de décoration – que l’on retrouve également chez Kunstermann et dans tant d’autres endroits.

L’alimentation n’est pas en reste : les étals croulent sous les « pains de fruits », les Lebkuchen (sortes de pains d’épices ronds recouverts d’un glaçage), les calendriers de l’Avent et surtout les énormes Christstollen (ou Marzipanstollen), les denses mais merveilleuses brioches de Noël. J’en raffole, mais deux mois à l’avance, à quoi cela rime-t-il ? Le soleil brille, nous sommes en bras de chemise et la ville est à l’heure de Noël. À peine les lumières de Noël seront-elles éteintes que l’on nous inondera du Carnaval, auquel succèdera sans une respiration aucune Pâques.

Laissez-nous tranquille quelques semaines ! Laissez-nous déguster le soleil ! Avec une bière, cela va de soi.

Zut, une rechute.

lundi 8 novembre 2010

Marcher dans la boue, sans gêne… (au Tegernsee)

L’automne est moins arrosé qu’il ne semblait devoir l’être. Le week-end en Chiemgau n’était pas le seul à être ensoleillé : le 30 octobre dernier, j’ai pu bénéficier avec une amie de quelques rayons pour découvrir un autre lac, le Tegernesee. On le rejoint par une heure de trajet d’un train très, très tranquille.

La bourgade qui porte le même nom rassemble, dans un entrelacs de ruelles paisibles, des maisons cossues, très soignées, souvent richement décorées. Tegernesse est un des endroits de Bavière où les fortunes vont prendre l’air et les eaux. On les comprend. Le soleil bas illumine les arbres dorés qui se mirent dans le lac. On y trouve naturellement un château, un ancien monastère sécularisé au début du XIXe siècle, pourvu, comme il se doit, d’une église baroque.

Nous n’étions pas là pour humer l’air frais et le parfum peu discret de la haute bourgeoisie, mais plutôt pour faire travailler les mollets sur les montagnes qui dominent le lac et lui constituent un écrin. Nous montons donc sur un des innombrables sentiers qui partent de la bourgade, en quittant peu à peu les villas prospères et les hôtels luxueux. Le sentier serpente dans un sous-bois où les feuilles ocre, brunes et rousses filtrent la lumière. Le soleil aide les troncs des bouleaux puis des sapins, vastes colonnes, à s’élancer vers le ciel. En approchant des mille mètres, nous rencontrons peu à peu des plaques de neige, là où le soleil a du mal à faire darder ses rayons. Les plaques se transforment en champs de neige, et le randonneur en gamin. Le sentier nous conduit vers un chalet de montagne qui fait office de restaurant d’altitude – on n’ose dire refuge, tant la nourriture est copieuse et l’affluence impressionnante. C’est une vraie brasserie, où l’on boit la Tegernsee, la bière locale, en admirant le reflet des sommets dans le lac.

L’on monte encore quelques mètres, pour admirer la vue, dans la neige. Le sommet du trajet est constitué par une butte exposée au nord, qui a donc gardé son manteau blanc. Nous y montons, avec peine, car le redoux la transforme en mélasse. Quand elle est fondue, elle fait apparaître des prés détrempés par l’humidité et par le piétinement des vaches. Ouh, la gadoue ! Les chaussures en sont pleines et finiront bien brunes de boue.

Comme toujours, l’effort est récompensé. Là haut, c’est un retable médiéval qui vous accueille, avec cet immense Christ sur fond de sommets et de nuages. Nous goûtons la vue.

Puis il faut poursuivre le chemin, floc !, ploutch ! C’est « matschig » comme on dit ici, et il faut à chaque pas lutter contre la chute. La descente en devient bien longue. Les heures passent. Nous admirons le soleil se coucher progressivement, découper des plans dans le lointain, caresser les nuages. Mais nous finirons, boueux, le chemin dans la nuit noire. Le chic ne passera pas par moi.

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Les jarrets d’aciers trouveront bien d’autres photos ici.