dimanche 28 novembre 2010

KZ Dachau (1)


Dachau est l’endroit où se situe un des camps de concentration les plus connus. On s’y rend en quelques minutes, par le bus, depuis la gare de la bourgade voisine.

La visite du camp est organisée de façon remarquable. On n’en ressort pas indemne, c’est entendu. Mais l’ignorant est édifié et celui qui sait n’en saura jamais assez.

Il subsiste peu des rails qui conduisaient dans le camp les wagons plombés bondés de déportés. C’est que la partie où ils se situaient, l’ancien caserne des SS, est désormais occupée par la gendarmerie bavaroise. Une ironie amère nous guette. Il n’y a cependant pas de solution de continuité entre les deux occupations du lieu.

L’entrée se faisait par le bâtiment appelé Jourhaus, encore debout, qui abrite la grille de fer au cynique et célèbre slogan, Arbeit macht Frei. Est également d’époque le bâtiment administratif, qui abritait aussi divers ateliers où l’on exploitait les prisonniers. À part les édifices spéciaux dont je reparlerai, il ne reste presque rien du camp, qui a pourtant été en activité douze ans durant (22 mars 1933-29 avril 1945). Des baraquements, on ne voit que la trace à même le sol, les contours gris, assortis parfois de fleurs. Tout a été détruit. C’est que le camp a beaucoup servi – y compris pour y enfermer les prisonniers nazis en 1945, ou pour accueillir les Allemands réfugiés en Bavière au lendemain de la guerre. On a surtout mis du temps à comprendre la nécessité d’en garder le souvenir. Il faut dire que, pendant près de vingt ans, les Bavarois et la Bavière ont opposé une extrême mauvaise volonté au désir des survivants de faire du camp un lieu de mémoire. Oublier, effacer plutôt que de stigmatiser. On voit que l’Allemagne a mis du temps à se regarder en face – elle n’est pas la seule, certes, et le portrait était pire que celui de Dorian Gray. Ce sont les anciens prisonniers qui l’on emporté et qui ont fait de ce camp ce qu’il est désormais, un terrible et nécessaire lieu de mémoire et d’histoire.

Deux baraquements ont été reconstitués à l’identique. Pas plus. Juste ce qu’il faut, avec les témoignages écrits et oraux pour prendre la mesure de l’entassement des prisonniers sur les lits en bois, la promiscuité, l’effarant nombre de personnes qui s’entassaient de plus en plus, comme jamais on ne traiterait même du bétail.

Le camp est un lieu du souvenir pour les survivants. Aussi y a-t-il été édifié une sinistre sculpture en mémoire de ceux qui y sont morts, en forme de barbelés. Mais les religions s’en sont aussi emparées. On y trouve ainsi une chapelle juive, un carmel, une chapelle catholique – les prêtres polonais ont été déportés ici en nombre –, une autre, protestante, et même une église russe en bois. On peut penser à de la récupération. Mais beaucoup de prisonniers enfermés ici étaient simplement persécutés à cause de leur foi. Chaque religion y entretient ainsi sa propre mémoire.

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