samedi 12 novembre 2011

Post scriptum : je suis poursuivi

Ne vous y trompez pas, le blog s’est bien achevé avec mon départ de Munich. Ce n’est qu’un petit bonus, une anecdote qui fait écho à la vie passée, avant de laisser le silence tranquille.

Le mois dernier, lors de mon premier dimanche parisien, après avoir vu l’arrivée des miens, j’aidais les cartons d’un ami à embarquer pour Munich. Je laissais les déménageurs dans le camion qui s’apprêtait à repartir, depuis la petite rue du XIe arrondissement où il était garé. À quelques mètres de là, passant devant un bar, mon œil est attiré par les verres que tiennent les consommateurs, ces grands verres de bière évasés qui ne peuvent contenir qu’un demi-litre de Weißbier fraîche (de la Paulaner). Au comptoir, de la Kölsch. A manger, de la Currywurst. Le public, nombreux, regardait avec attention un grand écran, sur lequel était projeté die Erste, avec l’incontournable programme du dimanche soir, la série policière Tatort. Plus allemand, tu perds ton triple A. L’Udo’s bar est en effet un des endroits où se rassemblent les Allemands de Paris – et des amateurs d’électro, bref des Berlinois. J’ai résisté.
*
Mais depuis une semaine, j’ai découvert à deux pas de mon centre de recherches, non loin du Palais Royal, un endroit où l’on peut manger à prix honorables, donc une grande rareté. Il s’appelle « Le Stube » et propose des produits germaniques, Strudel, Kartoffelsalat, Fritz-Cola, Weißbier Erdinger, une excellente Currywurst et de temps en temps… de la Weißwurst. J’ai craqué. Il y a un chef derrière cela, le peu que j’ai goûté est délicieux. Je suis poursuivi, mais c’est bon.

PS : il existe aussi une excellente épicerie allemande, Tante-Emma-Laden, mais s’y déplacer suppose un excès de nostalgie dans lequel je ne compte pas sombrer. Enfin, pas toujours.

samedi 1 octobre 2011

Je suis venu te dire que je m’en vais


Serge Gainsbourg - Je suis venu te dire que je... par melodynelson1972

À l’heure où vous lirez ces lignes j’aurais quitté Munich. Définitivement. Avec des cahots réguliers, le train de nuit file dans la nuit vers l’ouest. Mon devoir accompli, je retourne dans la ville lumière, au pays des pigeons, des toits en zinc, de la cinéphilie et des crottes de chiens. Adieu Weißwurst, Weißbier, vélo, Kaiserschmarrn, Käsekuchen, parcs, neige et Biergarten. Il faut bien s’en retourner vers mon boulot de dans deux ans.

Il n’est pas difficile de comprendre que je ne pars pas de gaité de cœur. Je finissais par me sentir ici chez moi. Oui, le parisien chez lui dans le « village d’un million d’habitants ».

Il me faudrait des pages pour dire ce que j’aime ici. Les gâteaux, bien sûr : (ici, mes préférés, ceux du Gartensalon - ici) nous sommes au paradis des pâtisseries. Mais aussi la Leberwurst, le pain, si varié, même s’il est rarement blanc, le goût des champignons, le sens des produits de saison et les schnitzel. Le calme, après la ruche parisienne, est lénifiant, comme le Munich vert, avec ses arbres autour des immeubles ou sautent avec grâce les écureuils, les parcs, les jardins et la nature si proche, avec ses lacs, dont je ne le lasse pas, ses grasses prairies aux vaches opulentes (et parfois baladeuses), ses montagnes souvent enneigées. Je me suis senti accueilli partout, comme on l’est toujours dans un magasin ou un restaurant. De prime abord, les relations humaines sont plus simples, plus directes, plus lisibles. Comment non plus ne pas se laisser gagner par la Gemütlichkeit, qui sauve la laideur de n’importe quel canapé – comme chez moi, où il est hideux, mais tellement agréable. Tout ce qui rend la vie plus facile, le sens pratique, du Bequem, qui met de l’huile dans tous ces petites tâches de la vie quotidienne. Essayez de fermer un carton, de franchir le portillon du métro à Paris, en revenant d’Allemagne, sans pousser des soupirs tant ça peut devenir une épreuve. Le contraste est sans appel. J’ai aimé aussi mes collègues, dont certains sont devenus des amis, chers. Simplement, sans arrière-pensée, sans jugement de valeur. Comment ne pas regretter les Biergarten, où je n’ai sans doute pas passé assez d’heures ? Comment n’a-t-on pas eu cette idée en France où il fait plus beau ? Boire une boisson fraiche, sous les arbres, sans service, avec des plats simples, que l’on peut emporter même depuis chez soi ? Une sorte d’aire de pique-nique aménagée, en ville, où il fait bon aller fêter… simplement la joie de vivre. Est-ce si compliqué ? Parmi mes souvenirs enchantés, se trouve aussi l’ambiance de Noël, la neige, les lumières partout, le Glühwein, les sourires sur les lèvres, la fièvre de faire plaisir… Et la musique, si importante dans cette ville, On peut même prendre goût à la Deutsche Welle, la musique allemande des années 1980.

Sisi..


Comment ne pas savourer encore les bars accueillants, les terrasses ouvertes en toute saison, la qualité de la bière? Ou la musique de la langue, que j’aime simplement entendre autour de moi.

Ne croyez pas que j’idéalise Munich ou l’Allemagne (vue depuis cette ville). J’ai aussi eu mes sujets d’agacement. La neige, je l’ai aimée, mais jusqu’à un certain point. Quatre mois, c’est trop ! L’hiver est long, on finit par se sentir comme une plante sans soleil, on les cherche convulsivement, le moindre rayon devient un sujet de pâmoison. Et puis cet ordre, si confortable, est un peu pesant. Trop d’ordre tue l’ordre. On se surveille, on vous dit même comment pisser. Cela dit, j’ai rarement eu à subir cette surveillance. Les Allemands sont aussi bien contradictoires : on prône le calme, on tombe à bras raccourcis pour la moindre note de Bach un peu trop haute chez le voisin, mais on use et abuse de tous les instruments les plus bruyants possibles, on a ici un pénible goût du moteur. Pour les voitures, cela a des effets parfois agréables, avec une présence régulière de beautés du passé
ou surprenantes, avec la plus grande concentration de Porsche que je n'ai jamais vue (c'est un spectacle quotidien)
Mais dans la vie de tous les jours, cela devient pénible.



pour les punir…
Autre contradiction : l’eau est excellente mais il est impossible de la consommer. Qui plus est, cette manie de mettre des bulles partout – les fameux schorrle – est à la longue lassante. Ils prêtent bien à sourire, aussi, ces Bavarois entrachtés pour n’importe quelle fête, endimanchés comme des manches, sombrant dans le kitch autant que dans la bière. Le fait est : ils s’habillent mal (et so what ?). Très mal.
Trop souvent l’humour n’évite pas la vulgarité – mais une vulgarité bon enfant qui peut amuser. La bière consommée massivement à même la bouteille par les plus (ou moins) jeunes, dans la rue, dans le métro, systématiquement fait un peu pitié.

Musicalement, il faut aussi subir la schlager et si la bonne humeur est toujours affichée, on peut trouver plus raffiné.

(encore qu’ici le refrain se finisse par « las uns fröhlich sein »...)

Une autre étrangeté, qu’il faut dévoiler : le plat le plus consommé par les Allemands n’est pas le rôti de porc à la choucroute ou la saucisse en petit pain, mais le curry thaï. Il est omniprésent à vous en dégoûter : les Allemands sont un peu obsessionnels ou routiniers en matière de nourriture. On pourrait aussi se moquer du dialecte bavarois, de l’accent qui en résulte et de tant de petits ridicules.

Mais tout cela n’est que peu de choses en regard de ce que j’ai apprécié ici, loin de tout ce qui me rendait Paris de plus en plus pénible. C’est personnel, naturellement, puisque lié aux conditions de travail, au mode de vie, à un état d’esprit, à mon entourage. J’ai aussi eu de la chance à Munich. Ce séjour est arrivé au bon moment dans ma vie. J’ai passé deux années merveilleuses, peut-être les plus belles. La seconde à deux, trois si je compte le travail…

Je m’en vais avec un serrement de cœur. La page se tourne, doucement. J’ai déjà un pied à Paris depuis quinze jours. Je m’adapterais, réapprendrai à aimer Paris, à oublier un peu München. Tout passe, avec le temps, qui, sur le sable…


Cette chanson…


Mais je revendrais de temps en temps : j’ai déjà pris des billets pour la mi-décembre…

À mes amis d’Allemagne, je dis au revoir, rien qu’un au revoir. À ma famille, à mes amis de France, un « à très bientôt », ne vous inquiétez pas, je suis heureux de vous retrouver. On peut laisser des parcelles de son cœur un peu partout en Europe sans avoir moins d’affection pour ceux qu’on aime.

Mais je ne quitterai pas Munich sur une note triste. Souvenons-nous que Munich c’est aussi l’endroit où l’on prise ce qui suit. Viel Spaß !

You now what?

Voici Angela Merkel

Elle ne vous rappelle pas quelqu'un?


Mais si.

Il faut dire que ça va mal pour elle en ce moment, entre une coalition en décomposition et des élections systématiquement gagnées par l'opposition. Et dire que je la quitte dans cet état. Quelle ingratitude!

vendredi 30 septembre 2011

Bequem

"Pratique", "facile" est Allemand. Regardez ces étiquettes de plaque de chocolat, ou de nougat: on a prévu un moyen pour en enlever le prix. Vous pouvez même offrir une simple plaquette de chocolat sans avoir à vous battre avec l'étiquette.

Un autre exemple: les cartons de déménagement, dont on doit, en France, renforcer massivement le fond. Prenons un exemple: d'une main, vous devez tenir les volets du dessus, de l'autre saisir le scotch, de la troisième, les ciseaux pour le couper, tout en serrant le carton entre vos jambes. Si vous avez une quatrième main, c'est encore mieux. Inutile ici, un système astucieux, monté en quelques secondes, vous donne un fond très résistant: un plier le premier fond; deux les revers, trois le replier à l'intérieur, ce qui assure la résistance de l'ensemble. Pas besoin d'adhésif (que l'on nommerait "Tesa" ici).

Tout est comme cela dans ce pays, sauf peut-être les formulaires administratifs, rarement bequem.

jeudi 29 septembre 2011

La nouvelle boisson bavaroise



Idéale pour les fins d'Oktoberfest.

Francophilie – Hier ist Frankreich einfach cool

Voici la série de DVD proposée par le Spiegel : du cinéma français. Rien d’exceptionnel, le cinéma français est très réputé ici, comme on le voit tant à la télévision qu’au cinéma. Certes, tout le monde ne le regarde pas en version originale, même s’il y a des amateurs. Mais la France est toujours un sujet d’intérêt. Le raffinement, l’art de vivre, la qualité de la cuisine font notre réputation – un peu usurpée. Cela dépasse le domaine du luxe et de la cuisine : la France est observée, étudiée, regardée. On en parle beaucoup aux informations, et aps uniquement ne raison du coupe présidentiel. Chaque décès d’acteur, de chanteur est commenté même sur l’équivalent de France Info, B-5-Aktuell, et dans les journaux. Un exemple : la mort de Maurice Garrel, l’acteur, père du cinéaste Philippe Garell et grand-père de l’acteur Louis Garell, a fait l’objet d’une information : ce n’est pourtant pas une grande célébrité et je ne suis pas sûr qu’on en a parlé sur France Info ou France Inter. Ces derniers publient régulièrement des analyses détaillées de livres français traitant de la France. La Bavière, très francophile, va peut-être plus loin dans ce travers que le reste de l’Allemagne. Le nord-ouest serait plus tourné vers l’Angleterre. Mais je retrouve le même intérêt sur les chaînes de télé et de radio nationales. Su les radios culturelles, on diffuse massivement de la chanson française : certes la pénible Zaz, mais aussi d’illustres inconnu(e)s. Le choix est discutable, mais touchant.

L’inverse n’est pas du tout vrai, les Français préférant se pencher sur l’Angleterre, qui nous détesterait tant et sur nos amusants voisins transalpins. De l’Allemagne, on s’en contrefiche. L’apprentissage de l’allemand est en chute libre, il est devenu un vestige, une curiosité. Ici, le français est encore la langue la plus apprise après l’anglais, même si l’espagnol est en train de monter à ses dépens.

Et si l’on veut s’amuser avec les clichés, on pourra regarder une émission, un talk-show dont l’animateur est un Français germanophone, Alfons, mal fringué (c’est l’hôpital qui se moque de la charité), qui cultive un terrible accent français et joue les persans en Allemagne, faussement idiots (son site ici). Quand un Bavarois présentera-t-il en culotte de peau une émission à la télévision française ?

mercredi 28 septembre 2011

Shoah à Würzbourg


Dans cette ville, on a discrètement signalé dans le sol les Juifs qui ont péri pendant et par le nazisme par des pavés dorés, devant leur domicile. On s'arrête, des noms sont sauvés de l'oubli, des tragédies se devinent, avec les noms de familles entières. On mesure progressivement l'étendue de la shoah, dans un ville, comme tant d'autre. Une idée intelligente.

mardi 27 septembre 2011

Que cherche-t-on à l'Oktoberfest?

Pour les dames, ceci:

Pour les hommes, cela:

Il y a du bouchon en perspective.

Un dernier coup de Maß


Jeudi dernier, j’ai fêté la fin de mon travail-marathon sur le Theresienwiese, là où se tient en ce moment l’Oktoberfest. Le soleil brillait sur les Biergarten. Dans les tentes, à la Hofbraü
à la Löwenbrau ou dans la plus belle, l’Hippodrom, on s’affaire, c’est l’usine à nourrir les soiffards. Les serveuses portent avec énergie leurs bocks de bière, ou font la queue avec leurs plateaux à remplir de canards, de poulets, de jarrets de porcs, de patates… Mon point de rendez-vous fut la boutique un rien kitch où l’on vend du cochon de lait, qui rôtit sous nos yeux et fond sous la langue.

Ceux qui n’ont pas le temps d’aller dans la direction indiquée par l’ange sont parfois dans un état de décomposition avancée. Mais il n’est pas besoin d’être saoul pour être un énergumène, on peut arborer sa chevelure ou des tatouages bariolés. Chose banale ici : je n’avais jamais eu autant de tatouages et de piercings avant de vivre en Allemagne.

Qui veut se transporter dans le passé peut faire un tout chez l’illusionniste, avec la femme sans tête, celle qui n’a pas de tronc, et bien sûr, le tour de lévitation, au truc assez réussi. C’est jour de fête à nouveau, mais avec six millions de visiteurs…

Nous finîmes au café Kaiserschmarren, mais mes amis s’y sont trop mal comportés pour que je vous en montre des photos. Que des bons souvenirs par conséquent. Une dernière fois.