dimanche 12 décembre 2010

Kinofreundschaft : un cinéphile peut-il survivre à Munich ?



(source: http://hammer.ucla.edu/about/billy_wilder_theater.html)

La réponse est simple. Certes, on y subit aussi le matraquage de blockbusters en 3D, comme ailleurs. Mais le réseau de cinémas est vaste et l’on peut voir nombre de films en VO (ici OF : Originalfassung), avec tout un dégradé de situations : OmU (Originafassung mit Untertiteln : avec sous-titres, allemands), OmeU (idem, mit englischen Untertiteln : sous-titre anglais, par exemple pour des films asiatiques qui n’ont jamais bénéficié de sous-titres allemands), ou le poétique OoU (Originalfassung ohne Untertitenl), film sans sous-titre, c’est-à-dire toujours en anglais. La maîtrise de l’anglais étant ici très bonne, on peut assez souvent voir des films anglo-saxons en VO intégrale. Même les grandes salles réservent des salles pour des séances OmU ou OoU.

Certains cinémas sont spécialisés dans la VO, comme le délicieusement désuet Theatiner Filmkunst, où l’on peut voir une abondance de films italiens ou français. J’y ai pour ma part découvert le Gainsbourg, vie héroïque de Sfar. Non loin du Deutsches Museum, une autre institution joue ce rôle, le Museum Lichtspiele, qui, avec plus d’un siècle, est le plus vieux cinéma d’Allemagne. (source: http://www.filmfest-muenchen.de/rc/ffm_en/filmfest/isarmeile.asp)
La ville salle a la forme d’un théâtre, avec même des places latérales fort peu pratiques.
(source: http://kerstinsklein.blogspot.com/2009/03/museum-lichtspiele-movie-craze_29.html)
D’où deux particularités. Il faut d’abord réserver ses places, selon une pratique très répandue en Allemagne. Pour ce cinéma, c’est indispensable, faute de ne pouvoir y entrer, comme je l’ai expérimenté – un lundi… La seconde est qu’il faut malgré tout arriver très tôt pour avoir les bonnes places, au prix d’une petite lutte un rien sauvage, dont on ne croirait les Allemands capables.

Ailleurs, on peut choisir une partie de la salle (devant, milieu, derrière), et un prix en conséquence. Une autre particularité qui étonnera les Français est la pause d’un quart d’heure qui intervient au milieu d’un film. Il s’agit sans doute d’un héritage de l’époque des changements de bobine, qui s’est institutionnalisée. En réalité, c’est la France qui fait exception : cette pause est aussi usuelle en Suisse et en Grèce, pour ne parler que des pays où je l’ai expérimentée. Ce n’est somme toute qu’un moindre mal si l’on considère le nombre consternant de coupures publicitaires qui interrompent ici les films à la télévision. Le rapport au cinéma est un peu plus différend que le nôtre : j’en veux pour preuve le bruit que font les spectateurs, même lorsque le générique est lancé, et le fait que l’on mange et l’on boit pendant le film, en abandonnant à la fin du film sa bouteille sur le sol ou le siège en sortant de la salle. L’attitude, qui m’a fait bondir la première fois, est normale, attendue : le personnel vient alors ramasser ce qui traîne. Pire: dans nombre de cinémas, même en l'absence de pause, certains spectateurs sortent au milieu du film pour aller aux toilettes, pour acheter à manger et à boire.

Le cinéphile est-il donc malheureux ? Non, car il est un cinéma qui ne pratique pas les coupures et qui offre de très belle rétrospectives. La ville possède un musée municipal, sis en plein centre, dans un vieux bâtiment médiéval, qui abrite aussi un cinéma, le Filmuseum. L’institution joue le même rôle que la cinémathèque à Paris : sauvegarder le patrimoine filmé, offrir des cycles et des rétrospectives, à un prix très abordable – 3 à 5 euros la séance, dans une salle très confortable. En ce moment, c’est une rétrospective Billy Wilder (Certains l’aiment chaud, pour citer le plus célèbre de ses films)qui fait mes délices. Les revoir est un plaisir, les découvrir une grande joie, ainsi le La Garçonnière (The Appartment), délicat, ou de l’hilarant et méconnu One, Two Three.


En parallèle, on peut découvrir les films d’animation du tchèque Karel Zeman (originaux et parfois délirants);

une série « films et psychanalyse », etc. On annonce pour janvier une rétrospective Melville. Comme un bonheur n’arrive jamais seul, le musée abrite aussi un café animé, chaleureux, où l’on peut manger et boire des petits plats originaux et peu chers. J’y ai même bu un bon vin rouge, c’est dire.

Munich est bien une ville pour cinéphiles. Pour le reste, nobody is perfet.





1 commentaire:

  1. Melville... Je crois qu'on peut revoir ses films vingt fois et y découvrir toujours quelque chose. La palette chromatique du Samourai n'a cessé de me bluffer.
    Pour l'anecdote, au début du Deuxième Souffle, on voit Lino courir après un train et chercher en vain ce "deuxième souffle" qui lui permettra de le rattraper. Lors du tournage, Melville a fait rouler le train plus vite qu'aux répétitions et Lino peine "pour de vrai". Il ne le pardonnera jamais à Melville et lui fera la gueule jusqu'à la fin du tournage. Bonnes séances!
    o2

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