lundi 5 septembre 2011

Nazi rock in München


La ville fut la « capitale du mouvement », chère à Hitler. Les hauts lieux du nazisme sont partout et « munichois » demeurera toujours une insulte. Dachau, j’en ai parlé, n’est guère éloigné. La ville a ce lourd poids sur elle. À l’étranger, on me demande parfois si ce n’est pas pénible de vivre chez les nazis – comme si j’allais faire mon S.T.O. – et on manifeste sa réticence à aller dans ce pays qui a tant fauté. Berlin, passe encore, c’est sexy Berlin. Mais Munich, c’est le putsch de la Brasserie, les culottes de peau et les svastikas.

Tout cela est faux. Un bref point d’histoire : Munich n’a pas été enthousiaste pour Hitler et, dans la Bavière, elle a toujours accordé beaucoup de moins de voix aux nazis que le reste du pays. Aujourd’hui, Munich est même une ville de gauche.

Second point, les Allemands face au passé nazi, vu d’ici. L’attitude que je décris est certes récente, mais c’est cette réalité qu’il faut juger. Le passé n’est pas caché, au contraire. À l’office du tourisme, il y a un rayon spécifiquement consacré à la visite de Dachau – ce qui laisse une curieuse impression – ainsi que des dépliants permettant de se représenter le passé nazi de la ville, de la parcourir ainsi. Sur la Königsplatz, les fondations des monuments à la gloire des morts nazis du putsch de la Brasserie, édifiés sur l’ordre d’Hitler, sont restées là, pour le souvenir. À côté, on trouve un grand panneau expliquant l’organisation du quartier, cœur du pouvoir nazi en Bavière. On va y édifier un grand centre de documentation sur le nazisme. À la télévision, on ne compte plus les documentaires et les fictions sur le sujet, qui montrent la réalité sans fards. Dans le secondaire, les élèves suivent pendant une année entière un enseignement sur l’Allemagne nazie – une de mes connaissance l’a même suivi pendant trois ans, initiative de professeurs particulièrement engagés. Et je pourrais ajouter bien d’autres faits qui vont dans le même sens : la mémoire est entretenue, enseignée, méditée.

Dans la vie publique, la vigilance est placée très haut. Les misérables dérapages xénophobes ou au moins douteux dont sont coutumiers nos hommes politiques français, en particulier ceux qui sont actuellement au pouvoir, seraient impossibles en Allemagne. Les mesures de mise en garde, de sensibilisation ne se comptent plus.

Certes, il y a une extrême droite, des crypto-nazis, avec le NPD, un parti groupusculaire et très surveillé. Il lui arrive de manifester sous des prétextes divers, comme ici contre la guerre en Afghanistan, en mai 2010. La manifestation (ici minuscule) est toujours accompagnée d’une vaste mobilisation, à la fois pacifique et provocatrice, comme ici, souvent massive. Je me souviens d’un épisode où, d’une part les policiers étaient plus nombreux que les militants du NPD (quelques dizaines), mais où les contre-manifestants étaient tellement nombreux (des milliers, venant aussi de la droite) qu’on ne pouvait même pas s’apercevoir qu’il y avait un rassemblement d’extrême droite.

Voilà pourquoi ces préjugés me consternent. On serait heureux que les Français soient aussi clairs sur leur passé et aussi vigilants que les Allemands. On serait content que la critique porte sur le pays qui n’a pas rendu ses comptes, l’Autriche, merveilleux endroit, mais où il est encore possible de tenir des propos antisémites et où aucun examen de conscience n’a jamais été fait. Que ceux qui ne vont pas en Allemagne à cause du nazisme et vont passer un séjour romantique à Vienne y songent. Ils vont dans le pays où l’extrême droite gère une région (la Carinthie) et a participé gouvernement il y a moins de dix ans. Mais les Autrichiens, dit-on, sont malins : ils ont fait croire au monde entier que Beethoven était autrichien et Hitler allemand.

2 commentaires:

  1. Tu peux aussi rajouter que c'est la Bavière qui possède les droits de Mein Kampf et prépare une édition spécifique lorsque les droits tomberont en 2015 dans le domaine public. Moi aussi les préjugés m'ééééénervent (et tu peux imaginer ce qu'ils sont après un aussi long séjour dans le pays des Alamans...)

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  2. Très juste, j'avais oublié... Le sujet est presque inépuisable!

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