samedi 3 octobre 2009

Oktoberfest! (1) viel Spaß !

Oktoberfest bat en effet son plein depuis deux semaines : comme son nom l’indique, la grande fête dite, chez nous, « de la bière » se déroule surtout en septembre. Il y a bien sûr une explication à cela, mais je ne compte pas faire un cours sur l’Oktoberfest. L’événement est de taille : on attendait cette année 6 millions de personnes, le plus grand rassemblement de ce genre en Europe – dans le monde, ajoutent les Bavarois. Il y aurait beaucoup à dire, mais je ne raconterai que ce que j’ai vu, au péril de mon intégrité physique et morale. J’avais une certaine appréhension : je ne goûte pas ces grands rassemblements et le souvenir des conséquences des fêtes de Bayonne, autre grand rassemblement de buveurs, n’incitait pas à l’enthousiasme. Après avoir noyé mes appréhensions dans des litres de bière, j’ai une vision bien plus positive de cette fête.

Elle n’occupe pas toute la ville, mais est concentrée sur une vaste esplanade située au sud de la gare centrale, le Theresienwiese (d’où l’autre nom donné à la fête : Wiesn). Il s’agit d’abord d’un vaste parc d’attraction, avec force trains fantômes, grands huit, auto-tamponneuses, illusionnistes, manèges, toboggans, mais aussi un cirque à puces et bien d’autres curiosités, pour les enfants, mais surtout pour les adultes. Comme dans tous les parcs, tout ceci est assez kitsch, mais très gai. J’ai d’ailleurs un grand regret, celui de n’avoir pas goûté au train fantôme. Naturellement, on y trouve des monceaux de nourriture, barbapapa, amendes caramélisées, sucettes, cœurs en pain d’épices, beaucoup de stands de « semmel » (petits pains qui forment la base des sandwiches), au poisson, mais surtout avec de la saucisse.

Où est la bière ? Dans l’allée, la principale pour tous les adultes, où se trouvent toutes les « tentes » (Zelten ou Hallen). Ce sont de vastes constructions en bois, en forme de maison plus que de tentes, pouvant abriter chacune plusieurs milliers de buveurs. Mais on y mange aussi, et parfois d’abord, car on trouve une tente gérée par un marchand de poisson, une autre spécialisée dans le bœuf (Ochsenbraterei, où j’ai mangé : très correct), une autre dans le vin. Six autres tentes appartiennent chacune à l’une des grandes brasseries de Munich. Mais on peut aussi y manger. En réalité on trouve à peu près partout le même type de décor et le même type d’ambiance. Quand on y pénètre le soir, c’est au premier abord un peu effrayant, tant le bruit peut sembler assourdissant : des milliers de personnes très gaies y parlent fort, y chantent, y mastiquent, y entrechoquent leurs chopes, marchent, bougent, se bousculent, s’interpellent et rigolent à gorge (très) déployée. Au centre, sur une estrade, un orchestre joue très fort, de la musique traditionnelle, mais aussi des Wiesn-Standards, des chansons composés spécialement pour la fête, souvent en dialecte bavarois, aux paroles assez stupides, mais qui entraînent toute la foule. Un des derniers exemples en date est « Anton aus Tirol », composé par un certain DJ Ötzi ; ceux qui n’ont pas froid aux yeux peuvent trouver le clip ici et les paroles . Mieux vaut y aller en groupe et se chercher une table, lorsque c’est possible. Assis, on peut manger de tout, en grande quantité, et bien sûr boire : pas seulement de la bière, mais surtout de la bière. Elle est servie en Maß, donc en litre, pas moins. Le poids se sent dans le bras lorsque l’on trinque, ce qui arrive très souvent : on finit par fêter tout et n’importe quoi et l’orchestre entonne régulièrement « Ein Prosit etc. ». Mais la bière, quoi qu’une disent les Bavarois, n’est pas bien forte. Avec la chaleur, la nourriture, l’ambiance, elle se laisse bien boire. Au fond, l’ambiance est très bon enfant : les gens lient très facilement conversation, rient, certes, de ce qui fait rire là-bas dans ces circonstances et qui n’est pas toujours fin, mais l’ambiance ne se prête pas au fleuret moucheté. Très vite, la moitié de la salle est debout sur les bancs ou les tables. Si l’on veut bouger un peu plus, on peut se plonger au centre des tentes, non loin de l’orchestre, où il y a juste de grandes planches qui forment comme des comptoirs de bars. On s’y accoude, s’y mélange. Des serveuses énergiques vous apportent l’incontournable Maß de bière. Elles se font les muscles en portant au moins une demi-douzaines de chopes en verre massif, tout en arborant un décolleté plongeant, histoire d’inciter à la consommation. Passent de temps à autre d’énormes brezel ou des cornichons non moins colossaux, pour qui veut éponger un peu sa bière. On danse, pas seulement allemand : la moitié de l’assistance doit être étrangère, les orchestres en tiennent comptent en jouant des standards internationaux. Nous avons ainsi été gratifiés de We are the Champions ou de Smoke on the Water. Puis vient le phénomène des ciseaux : la gaîté augmente avec le taux d’alcoolémie, le discernement baisse et il se passe des choses étranges. Certain(e)s embrassent des inconnu(e)s à pleine bouche, juste le temps d’une rencontre de muqueuses et puis s’oublient l’instant d’après. Après l’ambiance bon enfant, l’ambiance bon adolescent.

A onze heures du soir, un discret mais très présent service de sécurité incite la masse des buveurs agglutinés à s’en aller, car les tentes ferment. C’est bien tôt, mais la plupart ont commencé à boire aussi très tôt. Les tentes se vident doucement, sans heurts. On se rafraîchit dans les allées, on mange encore une saucisse avec du ketchup ou de la senf, on rit bêtement. Chacun regagne vaille que vaille le métro, le bus, en chantant Anton aus Tirol.


Pour les curieux, d'autres photos ici.

2 commentaires:

  1. J'aime beaucoup Anton aus Tirol. c'est fin, délicat, festif, et au moins, dans trois semaines, je suis sûre de me souvenir encore de l'air !!

    Christine

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  2. Et encore, as-tu saisi le sel des paroles malgré le bavarois?
    C'est efficace et entêtant, c'est pour cela que ça marche très bien dans ces grands rassemblements.

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