samedi 13 mars 2010

L’Allemagne sans alcool

On m’a parfois dit que ce blog sentait un peu l’alcool, et j’y parlais bien souvent de b…, suite à mes tests gustatifs. Le fait que l’on en consomme vraiment beaucoup ici, mais je voudrais aujourd’hui briser cette image un peu facile : il ne sera question ici ni de b…, ni de v… Amis de la ligue antialcoolique, vous pouvez lire ce billet sans effroi.

Il ne faut plus taire la terrible vérité : les Allemands boivent encore plus d’eau que d’alcool. Ils consomment d’impressionnantes quantités d’eau minérale. Cette passion les tient au point qu’ils ne boivent presque pas d’eau du robinet (Leitungswasser), qu’il est très rare d’obtenir dans les restaurants. On vous sert de l’eau minérale comme on achète chez soi des litres d’eau minérale. L’eau du robinet est pourtant excellente, du moins à Munich. Les puissantes compagnies françaises y trouvent leur compte, en vendant aux Allemands les eaux de nos Alpes, de nos Vosges ou de notre Massif Central. L’eau française ne tient cependant pas le haut du pavé, car, sauf rare exception, il lui manque un élément essentiel pour satisfaire le palais germanique : la bulle.


Les Allemands raffolent de l’eau gazeuse. Dans les restaurants, si l’on veut de l’eau plate, il faut le demander expressément : l’eau normale est gazeuse. Un Allemand vous invitera à dîner, et, s’apercevant de votre origine, s’excusera de n’avoir que de l’eau gazeuse – il ne lui viendra pas à l’esprit de vous proposer de l’eau du robinet. Parmi, les plus répandues se trouve celle-ci, qui m’amuse toujours.

La pétillante Geroslteiner vient de Gerosltein, qui n’est en rien une invention d’Offenbach, puisque cette petite ville existe bien et inonde l’Allemagne de ses eaux. L’eau est bien à la hauteur de la divine interprète de l’opérette, Felicity Lott – ici (et ci-dessous) et , sans mise en scène, mais quel abattage ! ou encore ici, pour un autre air. Et pour le plaisir, vous trouverez encore (et ci-dessous) le général Boum ou le trio des conspirateurs.




Mais revenons à nos eaux. La plus consommée ici est peut-être l’Adelholzener, puisée dans les Alpes. Ne pensez pas que l’eau sort ici naturellement pétillante : on lui ajoute simplement du gaz (Kohlensaüre). Dans la bibliothèque du Goethe Institut, il y avait ainsi un distributeur d’eau qui mélangeait du gaz à l’eau (de ville supposais-je), avec deux réglages, « beaucoup », ou « peu », pour les estomacs délicats.

Si ce n’est de l’eau, c’est du jus de fruits frais. On en presse dans tous les cafés, la plupart des restaurants. Sur le Viktualienmarkt, on trouve ainsi une demi-douzaine d’étals dont la seule raison d’être est de vendre du jus de fruit pressé sous les yeux du client (qui l’est moins). Été comme hiver, ils ne désemplissent pas. La passion allemande pour la bonne santé, pour la wellness, n’y est peut-être pas étrangère.


Mais il s’en faut pas de beaucoup que le résultat de cette passion ne soit anéanti par des consommations de produits chimiques. Avec l’eau et plus que la b…, la boisson favorite pour le repas du midi est le Spezi. Il s’agit tout bêtement d’un mélange de (coca-)cola et de Fanta, qui vraiment n’a aucun intérêt et pèse lourd sur l’estomac, du moins le mien. Ce concentré de chimie, qui est fabriqué en Allemagne depuis plus de 50 ans, doit avoir pour attrait les bulles qu’il contient. De nombreuses marques en fabriquent et sa célébrité est telle qu’on en fait des chansons, comme ici (en bas de la page du lien), ce charmant chanteur tyrolien – moins piquant cependant qu’Anton aus Tyrol.

Pire encore, on raffole ici des boisson à la taurine. Les présentoirs de Red Bull sont présents aux caisses des supermarchés ; la firme sponsorise de nombreux événements sportifs et l’on voit sans cesse des (plus ou moins) jeunes la canette à la main. Tout cela est consigné et, lorsque l’on fait la queue auprès des machines qui accueillent bouteilles et canettes, le Red Bull l’emporte souvent.

Le meilleur vient pour la fin. Les Allemands son tellement épris de la bulle, qu’ils en mettent partout. Bien souvent, plutôt que de boire du jus pur, ils le coupent d’eau gazeuse : c’est le shorle. L’Apfelschorle a le plus de succès. On peut tout shorrler, et tout se shorrle. On trouvera donc partout de ces shorle, des Saftschorle jusqu’aux Biershorrle (différent du panaché, qui se dit Radler) et, suprême audace, du Weinshorle.


C’est à ces détails là que l’on reconnaît être passé de l’autre côté du limes.

3 commentaires:

  1. Merci de ces quelques bulles offertes par Felicity Lott, peut-être plus champagne que minérale. C'est un plaisir que de revoir ainsi cette interprétation plus que pétillante!

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  2. Des bu-bulles, des bu-bulles ! (On a la culture qu'on peut..)
    Merci pour cette chronique très pétillante !

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  3. A nonyme:
    Champagne est le mot, que j'ai d'ailleurs failli employer. Le fait est que j'ai craqué en voyant qu'une bonne part de l'opérette dans la version du Châtelet avec Félicty Lott était en ligne. Un des mes grands souvenirs musicaux, si si...

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